A l’heure où les 200 hectares de la forêt de pins du Pignada angloy – une exception car situés en plein cœur de la deuxième ville la plus peuplée de l’agglomération BAB – bénéficie d’un suivi et de mesures particulières destinées à mieux le préserver tout en favorisant sa biodiversité, il était intéressant, avec François-Xavier Esponde, de porter un regard sur l’ensemble de la forêt landaise dont ce Pignada constitue la pointe la plus « méridionale ».
1 - Personne n’a oublié les tempêtes qui se succédèrent de décennie en décennie : la tempête « Martin » en 1999, puis la tempête « Klaus » en 2009, dévastatrices – toutes deux à des degrés divers - des terres et des cultures. Les Landais n’ont pas oublié leurs pins ravagés et le territoire forestier décimé lors de ces funestes épisodes !
Selon les statistiques, la forêt des landes de Gascogne occupe 66 % des surfaces de l’ancienne Aquitaine. 803 000 hectares de pins maritimes dont 93,7% sont privés, appartenant à 60 000 propriétaires. On précise que 8 500 000 M3 de grumes sont produits chaque année.
Les climatologues confirment que « face à la force d’un vent soufflant à plus de 150 km/h, les arbres souffrent et sont menacés dans leurs racines ».
Or, la moitié des 800 000 hectares de la forêt landaise avait été jetée à terre, créant un paysage de totale désolation que les autochtones n’avaient jamais connu depuis le XIXème siècle et le début de la plantation du pin maritime landais.
L’Aquitaine paya ainsi son lourd tribut à « Klaus » avec 90 % de ses arbres terrassés sur les 37,5 millions de mètres cubes des résineux détruits par le vent.
Mais depuis ces dix dernières années, les chercheurs de l’Inra et les producteurs se sont mis au travail en replantant 182 000 hectares de pin maritime sur les anciens sols dévastés.
Le Pinus Pinaster, du nom de l’arbre historique landais, a incité les scientifiques « à repenser l’arbre dès 1995, sous le nom générique de plan maritime du futur ». Des études qui prirent de l’importance après la tempête, le projet devenant prioritaire pour ces chercheurs et les autorités du département.
2 - La pratique en Ecosse et en Nouvelle Zélande servant de repère d’expérimentation, l’Inra analysa « l’incidence des vents sur les systèmes racinaires du pin maritime » à Gestas en Gironde, sur le site expérimental de l’institut de recherche régional. Le pin a des particularités spécifiques en cette contrée au sol sablonneux, et sa hauteur de trente à quarante mètres le rend vulnérable à la pression du vent.
- La densification des parcelles met à mal le développement des racines de l’arbre, et la conjonction des deux imposa des études préalables avant de replanter à nouveau les jeunes pieds de l’arbuste dans cet espace landais. Le fruit de ces études permit de comparer le système racinaire de 1000 pins de un à 60 ans.
- Les scientifiques observèrent que la masse des racines, leur grosseur et leur position déterminaient la croissance de l’arbre et sa capacité à résister au vent.
- La rectitude de l’arbre était encore un critère indispensable pour assoir sa résistance. « Vouloir rectifier génétiquement le pin maritime était un programme déjà engagé dans les années 1960 », ce travail se poursuivit en laboratoire et sur le terrain. Des arbres « d’élite » ayant été conservés par greffage, soulignent les ingénieurs de l’Inra, dans des parcs à clones.
- En croisant et en sélectionnant les jeunes pousses, les chercheurs disent déjà avoir pu réaliser des gains de 30 % pour la croissance et la rectitude du tronc de l’arbre. Depuis 2009, ce furent trois étapes de plantations successives en engageant désormais la quatrième, qui ont conduit les chercheurs à replanter le sol landais de pins maritimes améliorés avec leurs gènes modifiés.
Mais le changement climatique annoncé par le Plan Climator pour l’Aquitaine prévoyant une hausse de 1,4 % des températures et une baisse des précipitations à venir de 10 %, les producteurs de pin maritime estiment pour 2050 une baisse probable de leurs rendements de 10 %. Face aux aléas des climats, le planteur landais cultive sa forêt désormais « en prévoyant d’ajouter une biodiversité nécessaire en lisière des forêts » afin de limiter l’impact des crises sanitaires.
Il est question souligne l’Inra, « d’introduire de nouvelles essences pour produire de la biomasse et de la cellulose, et protéger les jeunes pousses des parasites, tels les bactéries, les insectes, les chenilles, les vers du bois »...
Le travail de la forêt est ainsi devenu un jardin grandeur nature pour ces producteurs qui récoltent annuellement 45 millions de plants et reboisent en remplacement des arbres coupés, sur un délai désormais réduit de trente ans à quarante ans au lieu des cinquante précédemment pour les arbres sur pied avant la coupe. « Des arbres génétiquement renouvelés, d’une hauteur moindre, dans des espaces entourés et préservés de parcelles en ilots par des haies de feuillus », la forêt y prend corps autrement dans un travail poursuivi et sous surveillance des techniciens et professionnels qui veillent à cette évolution.
- Le feu représentant une menace toujours habituelle, les précautions de protection, d’alerte ont mis la forêt landaise sous surveillance, car il en va de la survie d’un environnement inflammable et extensible, sous la poussée du vent. Les nouvelles plantations donneraient, comme l’indiquent les généticiens du pin maritime, « un meilleur rendement suite à ces nouvelles expérimentations, de 13 mètres cubes l’hectare par an, tandis que précédemment il était de 10 mètres cubes l’hectare pour l’année ».
Le pin des landes appartient à ce paysage bien typé de notre voisinage qui, suite à la tempête Klaus, a réveillé la profession de ces paysans sylviculteurs qui auront su, avec les experts du bois maritime, relever un défi vital pour leur travail et la fraîcheur d’un environnement landais bien singulier. L’âme landaise aime la forêt et la sylviculture correspondant à ses racines profondes !