En plein cœur du Pays Basque, le golf d’Arcangues offre une belle ballade sportive signée Ronald Fream : le déroulé de ses trous vallonnés autour de la vieille église du village et du château familial invite au calme bucolique. La chaîne des Pyrénées, arrondie par la douceur du climat, se pose en cadre inoubliable et l’océan atlantique se dévoile au loin comme une invitation au voyage vécue par de nombreux Basques qui n’hésitèrent pas à franchir les mers soit pour aller pêcher baleines, morues ou thons au grand large soit pour chercher fortune aux Amériques. Leur trace y est encore bien vivante et il faut avoir ainsi vu des milliers de Basques rassemblés dans le Nevada pour le comprendre.
Une nouvelle génération de parcours
Dans cette fin de terre du sud-ouest où sont nés après Pau, les premiers golfs de France, une nouvelle génération de parcours signés par des architectes américains de grand talent ont éclos ces 20 dernières années : Moliets (Trent Jones), Seignosse (Robert Van Hagge), Bassussary (Rocky Roquemore), Arcangues (Ronald Fream).
Ce dernier parcours qui a fêté ses vingt ans en 2011 s’inscrit dans une histoire et une géographie locales bien marquées.
Car l’Histoire joue un rôle important, ici au Pays Basque : le peuple est fier de sa langue, de ses traditions, de ses droits ancestraux, de ses pratiques sportives, culturelles et religieuses. Et la réalisation du golf d’Arcangues s’inscrit complètement dans cet esprit : il est même une prolongation contemporaine d’un aménagement territorial qui préserve une nature harmonieuse en butte à l’expansion immobilière et urbaine proche. Le pays a dû faire face à une industrie touristique mise sur orbite avec succès par Napoléon III et la princesse Eugénie de Montijo au XIXè siècle.
Guy et Jean
C’est ainsi que les deux frères, Guy et Jean d’Arcangues, héritiers de terres appartenant à leur famille depuis 1150 – selon un document transcrit à la cathédrale de Bayonne -, ont décidé de transformer quelques hectares agricoles en terrain de golf. En cette fin des années 80, portés par la vogue d’une vague, par la passion d’un sport et par l’amitié de Gaëtan Mourgue d’Algue, les voici lancés dans un chantier destiné également à éviter le morcellement de la propriété, à construire un environnement inaltérable et à offrir un développement économique lié à l’attrait touristique de Biarritz et de sa région.
Guy, c’est l’artiste doué, le mondain qui a fait partie de l’équipe de France de golf, le roi de la nuit et le prince de la poésie, journaliste à Paris Match et amant de la fête perpétuelle, courageux exemplaire quand la guerre bouleverse les consciences. Jean, c’est le bâtisseur, l’homme élégant et sensible, le visionnaire actif qui donne confiance et qui rassure.
Les deux font la paire, ils partagent, ils inventent, guidés par l’esprit de famille, celui qui, au Pays Basque, oblige au respect des valeurs et des biens communs. Non pas par simple conservatisme mais par souci légitime d’inscrire son développement dans une recherche d’équilibre ordonnancé.
Le golf, c’est justement une bonne manière de ne pas scinder une propriété multiséculaire, d’offrir un poumon vert à une agglomération galopante aux portes de Bayonne et Biarritz, de créer des emplois pour un village à la recherche de débouchés nouveaux.
Parcours de combattant
Vingt ans après, le défi est gagné. Pourtant, les débuts ne furent pas de tout repos : « un parcours de golf commence par un parcours … de combattant, aime souligner Arnaud d’Arcangues, actuel directeur, fils de Jean, tout comme Avelino, son frère chargé du terrain. Crise financière, contestation locale politisée, baisse de la demande immobilière ont ralenti la marche en avant du projet, sans jamais l’arrêter car les atouts étaient trop importants : site exceptionnel, proximité des axes de communication, image positive du Pays Basque, qualité de la réalisation du parcours et des équipements et accompagnement tout aussi amical que professionnel d’Olivier Léglise, un voisin fidèle qui continue à participer activement au développement du parcours et des terrains d’entraînement.
Cette qualité d’Arcangues, le visiteur la trouve dès son arrivée au club-house : une très belle ferme basque construite en 1585, dite la ferme du château -Jauregui Borda- qui abrita la famille Ostarena et que Jean, aidé par les architectes Jean Hébrard et Jacques Huguenin, a restauré merveilleusement en mettant en valeur l’immense terrasse prolongeant le restaurant : un lieu devenu culte pour les amateurs de vues scéniques. À l’intérieur, on notera le grand bar en acajou récupéré dans les caves de l’Hôtel du Palais et qui appartint au Sonny’s Bar, lieu emblématique des nuits biarrotes dans les années 60. Au dessus du bar, des caricatures réussies du dessinateur anglais Trice, et sur les tables, une cuisine simple et naturelle servie sur le plus beau des linges basques. Dans le salon attenant, on croise parfois des fantômes élégants, endormis dans des grands fauteuils de cuir.
Un golf de caractère
En effectuant ce parcours de 6 116 mètres des boules blanches (par 72, slope 142), l’impression qui reste est celle d’un parcours encore plus long : il faut dire qu’aux nombreuses dénivellations naturelles, s’ajoutent des ondulations voulues par l’architecte californien Ronald Fream, comme des vagues que l’océan proche aurait pu ajouter subrepticement. Alors, ainsi que l’écrivit un journaliste anglais, il faudra du « demanding courage and realistic self-examination » pour réussir sa carte. Pas besoin de traduire, vous comprendrez tout en arpentant ce golf de caractère dont les modifications apportées ces dernières années ont bien amélioré le parcours : agrandissement et refonte des greens, suppression des bunkers de parcours trop pénalisants, entrée de greens simplifiée, ajouts de back tees, autonomie en eau grâce à la récupération des eaux de pluie des habitations proches.
À l’aller, le premier drive de départ oblige à oublier la beauté du site ou la pression en provenance de la terrasse où papotent les amis. Le 4 est un joli par 3 en plongé suivi d’un par 4 en monté qui a un fort devers gauche menant tout droit à un hors-limite assez fréquenté. Le trou le plus dur de l’aller est le 7, par 5 de plus de 430 mètres qui punira les trop gourmands au drive. Attaquer le green par la droite si la ligne le permet pourra éviter de tomber dans un des bunkers protégeant l’arrivée. On retiendra le 8, pas difficile en soi, qui offre des vues très paisibles sur la campagne basque.
Un final parfait
Au retour, avant de se promener autour du château de famille1, il conviendra de bien jouer le trou n°12, le plus dur du parcours, un long par 5 qui contourne un lac très accueillant pour les hookers aux fortes épaules ; le lac passé, le coup d’approche devra être précis sur pour éviter bunkers et pentes difficiles à jouer. On est prié de sortir l’appareil de photo à l’entrée du green du 15 pour immortaliser la présence d’un vieil arbre tombant sur le green, sur fond du château et d’un chêne aussi costaud qu’un deuxième ligne du Biarritz Olympique.
Le final est parfait avec un trou 17 dont la vue au départ sera aussi immortalisée par une photo obligatoire, vue plongeante sur les montagnes et sur un green d’apparat entouré de sable blanc d’un étang aux couleurs sombres. Quant au 18, ce long par 5, parfois interminable, tient du calvaire et de l’arrivée au col du Tourmalet pour les amateurs de vélo et de Tour de France. Heureusement, le bar est proche !
1 Retrouvez l’élégant poéte Guy d’Arcangues dans le chapitre consacré au golf de Chiberta !