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Le pèlerinage annuel du lundi de Pentecôte vers les hauteurs d’Ainhoa nous donne l’occasion d’évoquer la belle église Notre-Dame de l’Assomption ainsi que cet intéressant édifice religieux qu’est la chapelle de N.-D. d'Arantza ou de l’aubépine : en langue basque l’aubépine se dit « elorri » ou encore « arantza ». Elle est située à 400m d’altitude sur les pentes du mont Atxulai, colline proche d’Aïnhoa.
Le poète Francis Jammes qui fut sensible à la beauté des lieux écrivit à propos de cet endroit :
« D'un vaste mouvement d'ensemble, la contrée / S'enlève, des plateaux aux cimes azurées. / Ces ondulations qui rampent vers les cols / Abritent les passeurs de laine et d'alcool ».
Certes, l’endroit est proche de la frontière… Mais ce n’est évidemment pas pour cela que l’on y a établi une chapelle. En fait, c’est parce que la tradition y place une apparition de la Vierge à un jeune berger au-dessus près d'une source qui jaillit sous un buisson d’aubépine ; une tradition en tous points semblable à celle qui prévaut pour le sanctuaire d'Aranzazu, au-dessus de l’université d’Oñate en Guipuzcoa, lieu de pèlerinage célèbre depuis le XVème siècle. Selon la coutume, le lundi de Pentecôte, une procession part de l’église Notre-Dame de l’Assomption au bourg pour se diriger vers la chapelle N.-D. d'Arantza dont l’histoire mouvementée a connu hélas plusieurs saccages : soustraite à l’ermite ainhoar Jean-Baptiste Beherecoche et brûlée pendant la Révolution française, elle avait été démolie en 1814 sous Napoléon Ier afin d’y installer une batterie de canons pointée vers l’Espagne. Il est possible que lors des guerres napoléoniennes, puis carlistes, les pèlerins du Pays Basque Nord aient été empêchés de franchir la frontière « franco-espagnole » (sauf évidemment les contrebandiers) alors qu’avant le XVIIIe siècle, de grandes foules de chez nous allaient faire leurs dévotions au sanctuaire guipuzcoan d'Aranzazu. Peut-être, les villageois avaient-ils déjà restauré la chapelle dans ce but au milieu du XIXème siècle…
Mais depuis lors, le temps a fait son œuvre et une quarantaine de bénévoles de l’association des Amis de la chapelle d’Ainhoa (Ainhoako Kaperaren Lagunak), s’affairent désormais tous les samedis à de nouveaux travaux de restauration dont la première tranche vient d’être inauguré lors du pèlerinage annuel de lundi dernier (voyez l’article de François-Xavier Esponde en rubrique « Tradition »). Un appel aux dons (nature ou espèces) avait d’ailleurs été lancé et l’on peut encore y contribuer (renseignements auprès de la paroisse d’Ainhoa, tél. 05 59 29 92 60 ou de la mairie).
La belle église Notre-Dame de l’Assomption.C’est une des plus vieilles et des plus intéressantes églises paroissiales du Labourd, avec son clocher carré par le bas, et octogonal par le haut, ce qui lui donne un aspect à la fois robuste et élégant. Le bâtiment a fière allure, surtout vers la fin de l’après-midi au moment où la lumière du soleil vient caresser la façade sud, remarquable pour la couleur ocre de ses pierres de taille.
D'origine romane, cette église est liée aux moines Prémontrés du village voisin d’Urdax. Ces moines défrichèrent les vallons et coteaux avoisinant leur couvent pour y fonder une colonie agricole qui sera à l'origine du village où se trouve notre église. Dès le début de sa construction, l’église fut fortifiée. Elle a conservé des meurtrières jusqu’à nos jours. Sa maçonnerie montre qu’elle doit dater des XI-XIIe siècles.
D’après Mikel Duvert, grand connaisseur de notre histoire basque, l’édifice primitif devait se fermer à l’ouest par un simple mur-fronton percé d’ouvertures pour des cloches et abriter un porche où se rassemblaient les maîtres de maison afin de régler les affaires de la paroisse et d’élire leurs délégués aux assemblées coutumières comme le Biltzar, au temps où notre pays jouissait d’une large autonomie. L’étage devait être en bois et fermé par des planches, à la manière des jauregi comme dans le Baztan voisin : Donamaria, ou Jauregizahar qui pourraient dater en partie du XIIIe siècle.
L’église a ensuite été remaniée entre les XVIe et XVIIe siècles, sans doute à l’époque où ses murs romans ont été surélevés. Et c’est à partir des années 1550 qu’apparaissent les deux étages de galeries pour adapter les églises à l’augmentation de la population.
La seconde galerie est datée de 1649. A ces époques les hargin (maçons-tailleurs de pierre) avaient délogé les zurgin (charpentiers), ils avaient pris la construction de ce pays en main (voyez leurs etxe, les stèles …)
Dans le village voisin de Sare, vers 1640, le célèbre Axular leur avait fait rehausser également l’église. On a donc surélevé les vieux murs latéraux (on voit extérieurement que la maçonnerie est peu soignée, elle devait être couverte de crépi) en supprimant l’étage en bois, on les a pourvus de fenêtres au sommet arrondi ; on a plaqué, contre la vieille bâtisse, la grande tour-clocher.
A l’intérieur, l’église présente un très beau retable, l’un des plus fins de cette province ainsi qu’un somptueux plafond à caisson, une merveille de la charpenterie basque, unique en son genre, au moins en Pays Basque Nord. Elle avait été entièrement restaurée sous la direction de Bernard Voinchet, architecte des Bâtiments de France. L’éclairage a été nettement amélioré. Les peintures du chœur ont été rafraîchies, le parquet retouché, les statues du retable entourées d’un halo de lumière qui les met en valeur. Enfin, le plafond en caisson, beaucoup mieux éclairé qu’auparavant.