La « bouillante » actualité au Proche-Orient fournit l’occasion de revenir sur cet événement aux conséquences « déterminantes ». Le 9 novembre 1917, le « Times » de Londres publiait la lettre que le Secrétaire d’Etat aux Affaires Etrangères britannique Arthur Balfour adressait à Lord Lionel Walter Rothschild (1868-1937), éminence de la communauté juive britannique et financier du mouvement sioniste : « Cher Lord Rothschild, j'ai le grand plaisir de vous adresser, de la part du Gouvernement de Sa Majesté, la déclaration suivante, sympathisant avec les aspirations juives sionistes, déclaration qui, soumise au cabinet, a été approuvée par lui. Le Gouvernement de Sa Majesté envisage favorablement l'établissement en Palestine d'un Foyer national pour les Juifs et emploiera tous ses efforts pour faciliter la réalisation de cet objectif, étant clairement entendu que rien ne sera fait qui puisse porter atteinte soit aux droits civiques et religieux des collectivités non juives existant en Palestine, soit aux droits et aux statuts politiques dont les Juifs disposent dans tout autre pays ». La suite des événements démontrait que les bonnes intentions de la « Déclaration Balfour », ne seraient pas exactement respectées… En fait, la promesse d'un foyer national juif sera mise en œuvre durant la conférence de Paris (1919), préalable au traité de Sèvres (1920), confirmé par la conférence de San Remo (1920). Elle débouchera sur le discours de David Ben Gourion (futur Premier Ministre du nouvel Etat d’Israël) prononcé à Tel-Aviv en mai 1948 : « Nous sommes solennellement réunis, nous, les membres de l'assemblée du peuple, représentants des juifs de Palestine et du mouvement sioniste, en ce jour de la cessation du mandat britannique. En vertu de nos droits naturels et historiques et de la résolution des Nations Unies (résolution 181, adoptée à la majorité par l'ONU le 29 novembre 1947, qui partage la Palestine en un État juif et un État arabe, ndlr.) nous proclamons la création d'un État juif sur la terre d'Israël ».
Nous publions ci-dessous la tribune que François-Xavier Esponde consacre à cet événement.
ALC
1 - Proclamé le 14 mai 1948, l’Etat d’Israël célèbre ses 70 ans en 2018.
Ben Gourion proclama l’Etat Juif sur la Terre d’Israël dans le Musée de Tel Aviv en présence des signataires de la nouvelle Constitution et d’une foule considérable assemblée autour du lieu pour soutenir le projet qui prenait effet le jour même de la fin du mandat britannique administrant la province. Un moment historique exceptionnel pour ces sionistes arrivés en « la terre sainte de leurs pères » par des voies maritimes, des voies terrestres, d’Europe, d’Afrique du Nord, des Etats-Unis et du reste du monde.
Les juifs, confrontés dès le départ à la présence des religieux israélites et des juifs sionistes agnostiques, rappelleront le statut bénéfique pour tous de la terre de leurs ancêtres devenue la terre de la promesse advenue au fil des péripéties de l’histoire et de la tragédie de la seconde guerre mondiale qui en avait fait un peuple martyr et victime de la barbarie nazie.
En cette « terra sancta », la présence des chrétiens et des musulmans rendit la cohabitation des religieux compliquée mais elle se poursuivit chaque année par la venue supplémentaire de milliers de pèlerins juifs pour honorer la mémoire d’Abraham, Isaac et Jacob, celle des prophètes de la première alliance, auxquels s’ajoutèrent les disciples chrétiens de la seconde alliance, ceux de Jésus le Nazaréen, ainsi que les musulmans qui se situent dans la zone réservée à leur culte dans la ville éternelle de Jérusalem.
Nous sommes en Israël, rien n’y est simple, toute présence est soumise aux contrôles continus de la sécurité et des hommes. La protection des sites historiques du pays distingue Tel Aviv, la capitale politique du pays, Jérusalem et bien d’autres villes de la vieille Palestine, considérées par chacune des trois religions monothéistes - juive, chrétienne et musulmane - comme des héritages sacrés de leurs pères à vénérer et à protéger.
Lors d’une conférence donnée par André Chouraqui au cours d’un colloque organisé à Bayonne par les amitiés judéo chrétiennes, le bibliste et ancien maire-adjoint de Jérusalem répondit à la question de la mixité de ces religions en ce lieu singulier de la terre juive en ces termes : « Il n’y a pas de mixité entre les fidèles des religions mais une communauté de vie et de foi pour chacune en relation avec les autres. Israël est le carrefour des humanités, des croyances et des religions, de la part de ceux qui les embrassent et de ceux qui croient en Israël comme le bien en commun des hommes attachés à sa terre, sa langue, son histoire »..
2- Israël n’est pas un Etat comme les autres dans le monde.
Sa singularité même le rend proche et distinct de chacun. La communauté juive de l’Etat d’Israël est le modèle complexe de la communauté internationale de tant de juifs venus au fil de l’histoire, du monde entier. Le propre de cette nation juive fut de rassembler en cette terre, les fils d’Israël de la diaspora ancienne en Europe, en Afrique, jusqu’en Asie et aux Amériques. On sait comment les juifs venus de la corne africaine furent accueillis par les autres juifs car, selon la mémoire historique de la nation juive, ils appartenaient à une des douze tribus primitives de la diaspora des temps anciens.
Dans ce pays toujours menacé et en guerre perpétuelle, le citoyen juif - homme et femme - est soumis aux règles de la défense militaire de la nation. En devenant citoyen de l’Etat d’Israël, il connait des devoirs et des contraintes. Le pays est constamment obligé de maintenir son unité contre les incessantes agressions envers son territoire.
Il est un sujet sensible auquel chacun se doit de se conformer. Eviter une fois encore la menace déjà vécue du génocide juif qui fit plus de six millions de victimes au cours du XXème siècle, bien présent dans la mémoire historique. Continuer à vivre malgré la guerre, les attentats et les violences endémiques sur une population exposée et constamment en alerte. A tout instant, le juif croit en la vie, à toute vie dont la sienne, dont il sait le prix et la valeur pour les siens et le reste des nations du monde. Parfois au prix surhumain des sacrifices rendus à la nation et aux visiteurs extérieurs qui s’étonnent toujours de l’endurance d’un peuple prompt à se défendre et prêt à affronter toute adversité du temps présent.
« Ah si je t’oublie Jérusalem, si ma main droite t’oublie, que ma langue s’attache à mon palais, Jérusalem de toutes mes joies » : en redisant plusieurs fois par jour cette prière à l’adresse de son Dieu et à sa nation, le juif pieux, citoyen de son pays, demeure fidèle à sa vocation. Car, l’existence même de ce pays est un mystère insondable de l’histoire humaine. Tant de pays dans l’histoire du passé ont péri sous la menace des invasions, or Israël demeure la sentinelle et la forteresse des nations pour chacun d’entre nous. Elle se protège, protège notre histoire et nous convie à partager en cette année 2018 une part de ce témoignage de vie promise de l’avenir !
François-Xavier Esponde, Pax Christi Bayonne