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Critique de Cinéma
Rifkin’s Festival (92’) - Film en coproduction États Unis/Espagne/Italie de Woody Allen
Rifkin’s Festival (92’) - Film en coproduction États Unis/Espagne/Italie de Woody Allen

| Jean-Louis Requena 733 mots

Rifkin’s Festival (92’) - Film en coproduction États Unis/Espagne/Italie de Woody Allen

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"Rifkin's Festival" de Woody Allen ©
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Wallace Shawn, Gina Gershon et Louis Garrel dans Rifkin's Festival de Woody Allen .jpg
Wallace Shawn, Gina Gershon et Louis Garrel dans "Rifkin's Festival" de Woody Allen ©
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Festival international de cinéma San Sébastian, en Espagne. L’américain Mort Rifkin (Wallace Shawn), septuagénaire bedonnant, accompagne sa femme Sue (Gina Gershon), la cinquantaine alerte, dans cette manifestation culturelle prestigieuse. Tous deux logent dans un palace, Hôtel Maria Christina ; ils suivent différemment la compétition : Mort s’ennuie, traine, dans les rues animées de San Sébastian ou il rencontre quelques connaissances. Sue, attachée de presse du jeune réalisateur français prometteur, Philippe (Louis Garrel), est très occupée par les projections, les conférences de presse, les réceptions. Le couple désaccordé se chamaille : Mort ancien professeur de cinéma critique, entre autres, l’indigence du film de Philippe « Apocalytic Dreams », tandis que Sue attirée par la personnalité distante de Philippe, l’encense. Pour Mort le film est boursouflé, prétentieux à l’image du jeune réalisateur.

Sue et Philippe sont de plus en plus complice, ce qui agace Mort qui se sent rejeté … et pas en forme physique. Sous l’insistance d’un ami, il consulte un médecin spécialisé, Jo Rojas (Elena Anaya) qui s’avère être une femme au prénom de Joana d’où la confusion. Mort est charmé par Jo, belle brune, avec laquelle il peut converser en anglais.

Mort cherche à revoir Jo, sous de multiples prétextes, fasciné par cette femme qui semble très malheureuse dans son couple … La nuit, auprès de sa femme endormie, il fait des rêves cinématographiques, en noir et blanc, de scènes mythiques du cinéma mondial …

Rifkin’s Festifal est le 50 ème long métrage de Woody Allen depuis 1966 (Lily la tigresse !). A 86 ans, il a une formidable carrière poursuivie depuis Match Point (2005) dans plusieurs pays européens : Angleterre, France, Italie. Après son dernier opus tourné en juillet 2019 à San Sébastian, mais diffusé tardivement a cause du Covid 19 et du manque d’enthousiasme des distributeurs américains, il est question d’un prochain tournage à Paris ! Rifkin’s Festival a tout d’un film testamentaire. Les obsessions cinéphiliques de Woody Allen sont présentées à travers le personnage de Mort, double du cinéaste. Ses réalisateurs de référence sont Orson Welles (Citizen Kane), Federico Fellini (8/12), François Truffaut (Jules et Jim), Jean-Luc Godard (A bout de souffle), Luis Buñuel (L’Ange exterminateur), Ingmar Bergman (Persona, Les fraises sauvages, Le septième sceau) et clin d’œil ironique à Claude Lelouch (Un homme et une femme). Les musiques originales de ces plans iconiques, reconstitués en noir et blanc, ravivent les souvenirs nostalgiques de ces films du passé. Dans Rifkin’s Festival Woody Allen a voulu « imbriquer la vie, le rêve et le cinéma » pour ce faire il choisit San Sébastian, « une ville enchanteresse », une ville balnéaire de cinéma avec son festival international de haute tenue … depuis 1953 ! Une fenêtre de liberté sous la dictature de Francisco Franco.

Après un dernier film en États-Unis en 2018 (Un jour de pluie à New York) qui a ravivé l’affaire Mia Farrow (débutée en 1997), le réalisateur est de nouveau accusé d’attouchements sexuels alors qu’il a été lavé de tout soupçon après deux commissions d’enquête. Son film n’est pas distribué aux États-Unis et dénoncé par ses interprètes ! Un jour de pluie à New York sort finalement en Europe où il rencontre un succès critique. En 2020 parait en France, aux éditions Stock, ses mémoires : Soit dit en passant (A propos of Nothing) après que plusieurs éditeurs les aient refusées (tout comme aux Etats-Unis !).

Nonobstant la légèreté du scénario, fait de rencontres fortuites, mais fort à propos, qui permet à l’histoire de se dérouler sans trop de heurts, le cinquantième long métrage de Woody Allen n’est pas dénué de charme tant par la ville de San Sébastian qui sert de décors naturels, et de personnages attachants (Mort et surtout Jo). Woody Allen même en petite forme (86 ans !) a du métier (scénario et realisation). De surcroit, il peut s’adosser à une équipe technique solide avec à sa tête le fabuleux directeur de la photographie italien, Vittoro Storaro (Le Dernier Tango à Paris, Apocalypse Now, 1900, Le Dernier Empereur, etc.) qui éclaire, pour la cinquième fois, une œuvre de Woody Allen.

Dans Riffin’s Festival le réalisateur exprime à travers le personnage de Mort son attirance pour les films européens (italiens, français, suédois, etc.), si éloignés de ceux fabriqués à la chaine (pas tous !) dans l’industrie hollywoodienne, passée et présente, avec ses films à 100/200 millions de $ qui ne sont que des opérations financières … risquées). 

Souhaitons que son prochain opus se déroule dans la capitale française car Paris est une fête !

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