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Décivilisation & barbarie
Nos morts bafoués : de la crémation au compostage en passant par le "soleil vert"
Nos morts bafoués : de la crémation au compostage en passant par le "soleil vert"

| Alexandre de La Cerda 1649 mots

Nos morts bafoués : de la crémation au compostage en passant par le "soleil vert"

La grandeur d’une société se mesure à son attitude à l’égard de ses morts. Une civilisation qui perd le respect de ses défunts se déshumanise peu à peu…
Et comme si la crémation ne leur suffisait pas, voilà que nos "têtes pensantes" s'avisent de conseiller la "terramation, c'est-à-dire la transformation du corps humain en compost après sa mort"
Dans sa question au ministre de l'intérieur publiée le 10 octobre dernier, le sénateur socialiste, écologiste et républicain de Charente-Maritime Mickaël Vallet s'inquiétait "de la mise en place du groupe de travail sur la terramation, démarche ayant pour but de réintégrer le corps humain dans le cycle naturel en transformant les restes du défunt en humus, couche supérieure du sol formée par la décomposition des matières organiques" :
https://www.senat.fr/questions/base/2024/qSEQ241001150.html
En effet, au mois de mars dernier, le gouvernement annonçait la constitution prochaine d’un groupe de travail destiné à étudier l’évolution du droit français (qui ne permet actuellement que l’inhumation ou l’incinération des dépouilles) afin de permettre d’autres modes de sépultures, comme le compostage des cadavres humains.

La constitution de ce groupe de travail répondait également à une proposition de loi portée par le député Modem Élodie Jacquier Laforge, afin de lancer une      «expérimentation visant à développer l’humusation».
Avec l’humusation, les dépouilles sont déposées sur un lit de matière compostable comme du broyat de branches ou des feuilles puis recouvertes de ce même matériau jusqu’à la formation d’une butte. Pionnière en ce domaine, la Belgique avait lancé deux expérimentations avec des porcs. Les tests ont révélé une faible décomposition des carcasses animales. L’analyse du centre des buttes avait démontré une hygiénisation insuffisante, en raison de l’influence de la température extérieure sur le déroulement du compostage. Et, sous les buttes, des quantités d’ammoniaque jusqu’à 57 fois supérieure à celle d’un sol témoin, ont été estimées susceptibles de polluer les cours d’eau. La Belgique avait donc, au début de cette, réaffirmé l’interdiction de l’humusation sur son territoire.

Et même le CNRS s'y met : "Peut-on réduire l’impact environnemental des défunts en compostant les corps ?"

Comment améliorer l’impact environnemental des défunts ? Est-il possible de développer des solutions régénératives pour l’environnement? La terramation, autrement appelée compostage funéraire, est-elle efficace et inoffensive pour les vivants? Lancé début avril 2024, le projet de recherche F-Compost porté par le CNRS avec l’université de Lille, l’université de Bordeaux et l’association Humo Sapiens veut répondre à ces questions.

Financé par l’Agence Nationale de la Recherche et mené en partenariat entre deux laboratoires CHJ (CNRS / Université de Lille) et PACEA) et l’association Humo Sapiens (Association qui a pour objet de rendre la terramation accessible en France pour régénérer l’environnement, de donner du sens à la mort et d’ouvrir de nouveaux imaginaires de société : https://humosapiens.fr/ ), ce projet de recherche F-Compost (s’inscrivant dans les projets « Science avec et pour la société – Ambitions innovantes » de l’Agence Nationale de la Recherche) lancé le 1er avril dernier et dirigé par Damien Charabidze, professeur des universités au Centre d’Histoire Judiciaire (CHJ - CNRS / Université de Lille), espère éclairer les décisions publiques sur le sujet a pour but de concevoir et tester expérimentalement des procédures funéraires de terramation. Des experts en anthropologie mortuaire, en biologie et en archéologie seront réunis autour de cette problématique, auxquels participeront également des acteurs de la sociétés civile, des collectivités, des professionnels et des représentant des agences sanitaires.
https://www.hauts-de-france.cnrs.fr/fr/cnrsinfo/peut-reduire-limpact-environnemental-des-defunts-en-compostant-les-corps

Comme souvent, l’exemple nous vient de la démocratie « éclairée » d’Outre-Atlantique 

Déjà quatre ans auparavant, un éditorial du Los Angeles Times abordait la question de la fameuse “empreinte carbone” de l’être humain. Et s’interroge gravement sur la crémation qui rejette, paraît-il, 6,8 millions de mètres cubes de CO2 dans l’atmosphère chaque année. “Heureusement”, le LA Times a une solution miracle: le compost humain, écologique :  https://www.latimes.com/opinion/story/2020-03-04/editorial-we-compost-everything-else-in-california-why-not-dead-bodies 

"La lutte contre le changement climatique ne se résume pas à retirer les voitures de la circulation et à fermer les centrales au charbon. Elle nécessite de repenser tout ce que les humains font et qui contribue de façon plus ou moins importante à notre empreinte carbone. Cela comprend la façon dont nous nous rendons au travail, ce que nous mangeons au dîner, les produits ménagers que nous achetons et même ce que nous faisons de notre corps après avoir quitté ce monde mortel.

C'est vrai. La mort a également des conséquences environnementales qui peuvent continuer à affecter la qualité de vie sur Terre pendant des années.

L'enterrement dans un cimetière implique souvent l'injection de produits chimiques toxiques dans le corps avant qu'il ne soit placé dans un cercueil en bois dur issu de la déforestation. Les cimetières utilisent de l'eau pour garder les sols verts et peuvent utiliser des pesticides et des engrais chimiques.

L'inhumation est également de plus en plus coûteuse, en particulier dans les endroits où les terrains sont rares ou chers. C'est l'une des raisons pour lesquelles la crémation est devenue plus populaire aux États-Unis que l'enterrement traditionnel dans un cercueil. Un peu plus de la moitié de tous les décès aux États-Unis se terminent par une crémation, et ce taux devrait atteindre près de 80 % d'ici 2040, selon la National Funeral Directors Assn.

Mais la crémation laisse aussi des traces sur l'environnement. Bien que les taux de crémation varient d'un pays à l'autre (au Japon, par exemple, ils sont proches de 100%), cette pratique produit globalement 6,8 millions de tonnes de dioxyde de carbone chaque année. Cela ne représente qu'une petite fraction des émissions mondiales de gaz à effet de serre, mais chaque petite quantité compte. Les installations de crémation sont également impliquées dans la pollution au mercure provenant des obturations dentaires vaporisées.

Que peuvent donc faire les personnes soucieuses de l’environnement avec leur corps une fois qu’elles n’en ont plus besoin ? Il existe un certain nombre d’options légèrement plus écologiques pour répondre à l’intérêt croissant, comme l’enterrement sans conservateurs ou dans des linceuls ou des cercueils entièrement biodégradables. Un jour, les gens auront peut-être même la possibilité de placer leurs proches disparus dans une capsule biodégradable sur laquelle un arbre, plutôt qu’une pierre tombale, sera planté. Plus tard cette année, les Californiens auront accès à une autre option écologique appelée hydrolyse alcaline, qui utilise de l’eau, de la lessive et de la chaleur pour décomposer le corps.

Mais il existe un choix respectueux de l'environnement qui n'est pas encore disponible pour les Californiens et qui devrait l'être : la réduction organique naturelle ou, plus simplement, le compostage humain hors sol.

L'État de Washington a légalisé cette nouvelle procédure cette année, devenant ainsi le premier État à le faire. En Californie, la députée Cristina Garcia (D-Bell Gardens) mène les efforts pour faire de même en créant un système de délivrance de licences pour les installations qui souhaitent proposer des services de compostage humain aux Californiens. Ces services ne sont pas exactement interdits pour le moment ; ils ne sont simplement pas spécifiquement répertoriés comme l'une des méthodes autorisées de disposition des corps en vertu de la loi sur les cimetières et les funérailles de l'État. Les législateurs du Colorado envisagent de faire de même...

Comme le décrit Spade, les corps seront placés dans des récipients tubulaires en acier sur une couche de copeaux de bois, de luzerne et de paille, puis recouverts du même matériau, ce qui crée les conditions propices à ce que les microbes chauffent jusqu'à 150 degrés et décomposent complètement le corps, y compris les os, les dents et les cheveux. Le travail des microbes neutralisera également les agents pathogènes. Le récipient sera aéré et tourné, et après 30 jours, tout ce qui restera, à part les matières non organiques telles que les couronnes dentaires, sera un matériau pelucheux qui ressemble à de la terre et qui peut être utilisé dans le jardin.

Cela peut paraître horrible, mais ce n'est pas si différent de ce qui se passe dans n'importe quel bac à compost de jardin, à condition que cela soit fait correctement. Et cela a une empreinte carbone bien plus faible que l'enterrement ou la crémation, dit Spade. Il convient également de se rappeler que les corps dans les cercueils ne restent pas intacts au fil des ans. Sans vouloir être trop précis, ils pourrissent.

Cerise sur le gâteau, en sublimes “tolérants” qu’ils sont, les braves progressistes du "Los Angeles Times" concèdent que "le compostage ne convient pas à tout le monde. L'Église catholique, pour sa part, s'oppose au compostage humain, arguant que c'est un manque de respect. C'est très bien. Les catholiques peuvent toujours choisir d'enterrer leurs proches disparus. Mais pour ceux qui n'ont pas d'objections religieuses ou philosophiques et qui se soucient de l'impact que leur vie après la mort peut avoir sur la vie future de ceux qu'ils laissent derrière eux, le compostage humain devrait être une option".

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Le film "Soylent Green" (Soleil Vert) ©
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Ben voyons !
Il ne manque plus au tableau que le film « Soylent Green » (Soleil Vert), ce film de science-fiction tiré d'un roman de Harry Harrison publié en 1966 - « Make room, make room » (en français : « Dégagez, faites de la place ! » -, les personnes ayant atteint un certain âge se faisaient projeter, dans un endroit qui fait penser aux dômes IMAX d'aujourd'hui, des documentaires animaliers, des films sous-marins, des paysages naturels magnifiques, images banales mais qui, après deux heures de plans généraux d'un New York à aspect de bidonville, baignant dans un smog jaunâtre, agité d'émeutes dégagées au bulldozer, prennent une tonalité bouleversante. Les spectateurs de ce « paradis perdu » se faisaient ensuite euthanasier, et les protéines ainsi récoltées de leurs cadavres étaient transformées par le géant agro-alimentaire « Soylent Company » pour servir, sous forme de tablettes vitaminées sans goût ni texture, à l'alimentation d’une terre surpeuplée.

Ce film décrit en outre des politiciens corrompus, des capitalistes cyniques, et des scènes d'émeute… De quoi s’interroger sur l’orientation que d’aucuns veulent imprimer à notre monde contemporain !

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