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Billet d'humeur
Les chuchoteurs, les murmureurs, et autres fâcheux…
Les chuchoteurs, les murmureurs, et autres fâcheux…

| Jean-Louis Requena 622 mots

Les chuchoteurs, les murmureurs, et autres fâcheux…

De passage à Paris, ville lumière, le grand réalisateur sud-coréen Bong Joon-ho (Memories of Murder, Parasites - Palme d’or au Festival de Cannes 2019 et Oscar du meilleur film la même année) repère un film qu’il souhaitait voir depuis de nombreuses années. Paris est encore le paradis pour les amoureux du cinéma sous toutes ses formes et compte bon nombre de cinéphiles « endurcis ». Songez : plus 200 salles obscures, lesquelles mettent en lumière des centaines de films par jour ! Certains cinémas ont une spécificité : à chaque séance de la journée, ils lancent un film différent ; une mine d’or pour les amoureux du 7 ème art.

Notre sud-coréen ravi achète son entrée pour le mythique Studio Galande, rue Galande (Paris Vème). Confortablement installé dans une salle quasi déserte, il attend le début de la projection. 
Soudain deux jeunes couples bruyants entrent dans la salle et s’installent à force bourrades demi amicales quelques instants avant que les lumières ne s’éteignent. Le grand Bong Joon-ho qui se faisait une joie de visionner enfin, pour la première fois, un long métrage rare absent de sa cinéphilie se dit en coréen : « c’est fichu, ils vont me pourrir le film que je désire tant voir ! ». Les lumières s’éteignent, le générique illumine l’écran… silence soudain, absolu. 

Surpris, interloqué, mais ravi, Bong Joon-ho a narré cette histoire dans un magazine qui démontre, que dans notre belle capitale, un tantinet défigurée ces temps derniers, les Français ou tout du moins les Parisiens, sont amoureux du spectacle cinématographique. Il est vrai que cet art d’origine française est né à Paris (première projection à Paris le 28 décembre 1895 par des lyonnais, les frères Auguste et Louis Lumière) avant d’être une industrie qui s’est déployée sur les cinq continents. 
Ceci explique, peut-être, l’origine de ce tropisme. Lors d’un séjour très récent à Paris, ma femme et moi, en fréquentant assidûment les salles obscures, avons constaté la véracité des propos du réalisateur coréen : quand les lumières baissent puis s’éteignent le silence règne. Place au spectacle !

Dans notre région, pour d’obscures raisons, inidentifiables (?), il n’en va pas de même … 

Au Pays Basque, nous avons l’opportunité de bénéficier de nombreux cinémas d’art et d’essais (Bayonne, Biarritz, Guéthary, Ciboure, Saint Jean-de-Luz, Saint Palais, etc.) qui par la qualité de leur programmation devrait « mécaniquement » attirer un public instruit, cultivé, curieux, pour qui le cinéma n’est pas qu’un simple divertissement mais une fenêtre ouverte sur le monde complexe, sans cesse en mutation. 
Idem pour les spectacles vivants, en particulier les concerts de notre Orchestre du Pays Basque dont la saison en cours est intéressante, novatrice à plusieurs titres. 
Hélas, hélas, rien n'y fait. Quels que soient les spectacles dans les salles obscures et dans celle des concerts, les chuchoteurs, murmureurs et autres fâcheux sont toujours présents, toujours actifs, d’une façon directe (verbiage) ou indirecte (sonnerie de portable !).

Il y a quelques semaines, durant un concert de l’OPB deux dames respectables ont disserté longuement à voix basse, mais parfaitement audible pour une oreille normale… la mienne. Elles ont en toute candeur pourri une partie du concert jusqu'à mon intervention ferme mais… à voix étouffée ! Que des personnes d’un certain âge ou d’un âge certain se comportent sans discernement avec désinvolture vis-à-vis des autres spectateurs me désole. 
J’y vois l’effet pervers des innombrables spectacles ineptes devant « d’étranges lucarnes » qui ouvrent les vannes d’échanges décousues sur un flux d’images coulant d’un robinet d’eau tiède. D’aucuns affirment que la télévision est un appareil électroménager ! Mais c’est un autre sujet sur lequel nous ne nous épancherons pas.

En conclusion, je lance un appel : sus aux chuchoteurs, murmureurs et autres fâcheux qui dégradent en toute impunité, ingénuité (?), nos spectacles culturels (films, concerts, etc.). Qu’ils se taisent, ou nous les ferons taire. Passez le mot !

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