0
Poésie de la semaine
La prière et les réflexions prophétiques de Soljenitsyne
La prière et les réflexions prophétiques de Soljenitsyne

| Rédaction 915 mots

La prière et les réflexions prophétiques de Soljenitsyne

En rapport avec la tragique situation en Ukraine, nous avons choisi cette belle prière composée par Alexandre Soljenitsyne :

Prière

Comme il m'est aisé de vivre avec Toi, Seigneur !
Comme il m'est aisé de croire en Toi !

Quand mon intelligence s'écarte stupéfiée
ou se décourage,
quand les plus intelligents
ne voient pas plus loin que ce soir
et ignorent ce qu'il faut faire demain

Tu m'envoies la claire certitude
que Tu es
et que tu prendras soin
que toutes les voies du bien ne restent pas bouchées.

Parvenu à la crête de la gloire humaine,
je me retourne avec étonnement sur le chemin parcouru
à travers la désespérance à ce point
d'où j'ai pu renvoyer à l'humanité
un reflet de Tes rayons.

Et tant qu'il sera nécessaire
que je les reflète encore
Tu me donneras de le faire.
Quant à ce que je n'aurais pas le temps d'accomplir –
C'est que tu l'auras imparti à d'autres.

Alexandre Soljenitsyne (traduction de Daniel Struve)

Mais Soljenitsyne n’en était pas moins conscients des nuages qui s’amoncelaient à l’horizon... 
Il avait perçu la perte continue de toute conscience et l’impudence à l’origine de grands dégâts dans les âmes, et l'intensité destructrice des passions autour de la question russo-ukrainienne. Déjà en 2006, il avait qualifié de particulièrement brutale la  persécution et la répression fanatique de la langue russe.
Et le prix Nobel ne doutait pas qu'à travers les « révolutions de couleur », un encerclement complet de la Russie se préparait, aboutissant la perte de sa souveraineté. Ces pensées avaient été exprimées dans un de ses derniers entretiens. En voici un extrait :

« Ce qui se passe en Ukraine, même d'après la formulation faussement construite pour le référendum de 1991 (j'ai déjà écrit et parlé à ce sujet), constitue mon amertume et ma douleur constantes. 
La répression fanatique et la persécution de la langue russe (qui, dans les sondages précédents, était reconnue comme la langue principale par plus de 60 % de la population ukrainienne) est simplement une mesure brutale et dirigée contre la perspective culturelle de l'Ukraine elle-même. - D'immenses étendues qui n'ont jamais appartenu à l'Ukraine historique, comme Novorossiya, la Crimée et tout le Territoire du Sud-Est, sont insérées de force dans la composition de l'État ukrainien actuel et dans sa politique d'entrée avidement souhaitée dans l'OTAN. 
Pendant tout le temps d'Eltsine, pas une seule rencontre avec les présidents ukrainiens n'a été sans capitulations et concessions de sa part. L'éradication de la flotte de la mer Noire de Sébastopol (jamais cédée à la RSS d'Ukraine, même sous Khrouchtchev) est un outrage malveillant contre toute l'histoire russe des XIXème et XXème siècles ».

Or, se plaisait-il à souligner, en remémorant l’histoire commune des Russes, Ukrainiens et Biélorusses :
« Notre peuple n’a été, du reste, séparé en trois branches que par le terrible malheur de l’invasion mongole et de la colonisation polonaise. C’est une imposture de fabrication récente qui fait remonter presque jusqu’au IXe siècle l’existence d’un peuple ukrainien distinct, parlant une langue différente du russe. Nous sommes tous issus de la précieuse ville de Kiev « d’où la terre russe tire son origine », comme le dit la Chronique* de Nestor, et d’où nous est venue la lumière du christianisme. (…) C’est le peuple de la « Rous » de Kiev qui a créé l’État de Moscovie. Englobés dans la Lituanie et la Pologne, Blancs-Russiens et Petits-Russiens restèrent conscients de leur identité russe et luttèrent pour n’être ni polonisés ni catholicisés. Le retour de ces terres dans le sein de la Russie fut senti par tout le monde, à l’époque, comme une 
Réunification ».
(…)
« Nous avons traversé ensemble les souffrances de la période soviétique : précipités ensemble dans cette fosse, c’est ensemble que nous en sortirons. (…) La voie doit être ouverte toute grande à la culture ukrainienne et biélorusse non seulement sur le territoire de l’Ukraine et de la Russie Blanche, mais aussi, cordialement et joyeusement, sur celui de la Grande-Russie. Pas de russification forcée (mais pas non plus d’ukrainisation forcée, comme on en a connu à la fin des années vingt), un développement sans entraves de nos cultures parallèles, et la classe faite dans l’une ou l’autre langue au choix des parents ».

Soljenitsyne dénonça la « répression et la persécution fanatiques » par les autorités ukrainiennes de la langue russe, privée du statut de deuxième langue officielle d’Etat, déclassée en langue étrangère ou facultative, bannie des médias et du système scolaire, alors que « plus de 60% de la population la reconnaissent comme leur langue principale ».
« L’erreur oppressive de l’Ukraine, déclara encore le prix Nobel, consiste précisément dans l’agrandissement à outrance sur des terres qui ne lui avaient jamais appartenu avant Lénine, à savoir les deux oblasts de Donetsk, toute la ceinture sud de la Novorossie (Melitopol-Kherson-Odessa) et la Crimée. Accepter le cadeau de Khrouchtchev (de Crimée, en 1954, ndlr) n’était pour le moins pas très consciencieux. La concession méprisante de Sébastopol, sans même mentionner les victimes russes, les documents juridiques soviétiques, n’est rien de plus qu’un vol d’État. »

Il entrevit dès ce temps-là le jeu pervers des Etats-Unis dans ce positionnement anti-russe de l’Ukraine :
« La position anti-russe de l’Ukraine est exactement ce dont les États-Unis ont besoin. Les autorités ukrainiennes sont heureuses de soutenir l’objectif américain d’affaiblissement de la Russie ».

Et il prophétisa ce qui se déroule aujourd’hui sous nos yeux :
« En aucune circonstance, la Russie n’osera en aucun cas trahir les plusieurs millions de Russes qui peuplent l’Ukraine, renoncer à notre unité avec eux ».

Répondre à () :

| | Connexion | Inscription