Le monde culturel - musique & arts plastiques - et gastronomique vient de perdre un de ses éminents représentants en la personne de Jean-Michel Barate, premier adjoint au maire d'Anglet, décédé mardi à Ansbach en Bavière où il était en visite dans le cadre du jumelage liant les deux villes depuis 1968.
C'était à la clinique d'Ansbach "après une urgence médicale" d'après les informations locales.
Voilà près d'un demi-siècle que j'avais connu Jean-Michel Barate, lorsqu'à la suite de ses études d’histoire, il était devenu l'attaché parlementaire de Bernard Marie, à l'époque député, puis maire de Biarritz où j'étais revenu après mon service militaire.
Son mariage de jeune élu à la mairie d'Anglet lui avait fait également épouser la tradition gourmande des chocolats Daranatz, cette maison bayonnaise renommée qu'il reprit de ses beaux parents.
Durant de longues années, ce chocolatier passionné avait prêché la qualité dans ses ateliers traditionnels, tout en professant pour la musique une passion immodérée à l'image du médecin Tchékhov avouant la littérature pour maîtresse !
Car, Jean-Michel Barate était "tombé dans la marmite musicale" dès sa jeunesse comme il me l'avait confié il-y-a bien des années au cours d'un entretien pour l'hebdomadaire régional : « mes parents aimaient l'opéra et j' ai eu la chance d'avoir un merveilleux professeur de musique qui m'a beaucoup ouvert les oreilles ».
En particulier Richard Wagner auquel il avait consacré – j'allais écrire « s'était consacré (au compositeur) » - tant de conférences passionnantes : « sa musique est bouleversante », m'avait-il déclaré en repartant à « Bayreuth où l'émotion qui en sourd est démultipliée par les lieux ; la mort d'Isolde n'arracherait-elle pas des larmes à une pierre » ?
En 1979, Jean-Michel Barate s'engageait dans "l'aventure" du festival "Musique en côte basque" que dirigeait alors Jean Darnel, avant de le présider pendant 25 ans, de 1992 à 2017.
Avec autour de lui, une équipe de bénévoles aussi passionnés de musique, et quelques mécènes, qui se battaient afin de faire vivre la manifestation : car, m'avait-il dit, « il y a toujours des amateurs de belle musique en des lieux privilégiés comme les églises basques où la beauté de l'architecture liée à l'acoustique crée une ambiance unique » .
Et lorsque je l'interrogeai sur les difficultés rencontrées actuellement par les jeunes pour se familiariser avec la musique classique, il me répondit avec raison : « le premier problème est l’éducation, ou ce qu’il en reste dans les écoles : si on ne donne pas aux jeunes toute la palette des disciplines artistiques, ils ne vont pas le découvrir tous seuls. L’Etat se désengage des conservatoires régionaux, c’est le grand problème ; heureusement, à Bayonne, l’agglomération compense, mais ce n’est pas le cas dans d’autres villes. Or, l’Etat ne reste actif que dans quelques institutions parmi les plus élitistes, c’est là le paradoxe ! Il faudrait que les ministres de la Culture et de l’Education se parlent. On ne peut pas se contenter de remplir la nouvelle salle de la Philharmonie, l’arbre parisien qui cache la forêt du pays réel » ! Une analyse toujours d'actualité...
Jean-Michel Barate avait également présidé le syndicat mixte gestionnaire de l’Orchestre de Bayonne Côte basque, en étant fier d’avoir collaboré avec « le Docteur Henri Grenet, maire de Bayonne, qu’il considérait comme un pionnier en la matière ».
Avant d'être nommé président de l'Etablissement Public de Coopération Culturelle du Sud Aquitain, Jean-Michel Barate avait déjà été, à l'initiative du Docteur Grenet, aux commandes de la Scène Nationale, « une très belle institution qui a fait la preuve de son éclectisme, d’une intelligence et d’une ouverture manifestes » et à laquelle il avait participé à ses débuts en tant qu'élu de la ville d’Anglet à partir de 1977, puis adjoint à la Culture de 1983 à 1999.
Et en janvier 2021, Jean-Michel Barate avait reçu l'ordre des Arts et des Lettres. R.I.P.