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Nos disparus
In Memoriam : les pianistes Nicholas Angelich et Radu Lupu, familiers du Pays Basque
In Memoriam : les pianistes Nicholas Angelich et Radu Lupu, familiers du Pays Basque

| Alexandre de La Cerda 656 mots

In Memoriam : les pianistes Nicholas Angelich et Radu Lupu, familiers du Pays Basque

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Ciccolini et Angelich, l’élève et son maître ©
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Nicholas Angelich, "victoire de la musique classique" ©
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Radu Lupu ©
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Le royaume de la Musique pleure les pianistes Nicholas Angelich et Radu Lupu, respectivement disparus à 51 ans (à cause d’une maladie pulmonaire qui l’avait éloigné de la scène depuis quelques mois, déjà), et 76 ans pour Radu Lupu, décédé dimanche à Lausanne des suites d'une longue maladie qui lui avait fait mettre un terme à sa carrière à l'issue de la saison 2018-2019. 
Les deux interprètes avaient, chacun, connu un brillant parcours qui avait marqué de belles étapes au Pays Basque. 

Pianiste secret mais éloquent, au toucher inoubliable, Radu Lupu aura fait de Schubert un de ses compagnons de vie dont il paraissait deviner les plus intimes pensées, comprendre les plus infimes confidences… Le pianiste roumain s’était en particulier produit en soliste avec l'Orchestre Symphonique d'Euskadi au Kursaal de Saint Sébastien et au Palais Euskalduna de Bilbao pendant la saison 2006/2007. 

Quant à Nicholas Angelich, il sillonnait le monde pour donner des récitals, interpréter des concertos ou de la musique de chambre, souvent avec les frères Capuçon, et il était devenu un habitué de la côte basque : je me souviens en particulier du Festival « Musique en Côte Basque » en septembre 2010 lorsqu’Aldo Ciccolini avait présenté à Biarritz l'un de ses plus prestigieux élèves, Nicholas Angelich ! Et auparavant, le pianiste né aux Etats-Unis (d’un père violoniste originaire du Monténégro et d’une mère pianiste née en Russie, bien que d’ascendance roumaine et slovaque) n’avait-il pas joué malgré les événements tragiques du11 septembre 2001 qui avaient endeuillé son pays, avant d’illustrer la 47ème édition de « Musique en Côte Basque » qui rendait hommage (en 2006) au génie de Mozart ? 
D’ailleurs, pour l’enregistrement de son premier disque, il avait décidé d’enregistrer Rachmaninov car à l’époque, « la musique russe l’attirait énormément » !

Il y a quatre ans, lors du festival Ravel, dans une église de Ciboure archi-comble, Nicholas Angelich avait encore interprété un programme d’une richesse et d’une intensité exceptionnelles, « construit avec un sens aigu de l’art dramatique musical » comme le soulignait Etienne Rousseau-Plotto dont nous reproduisons la belle critique en guise d’adieu au talentueux interprète : 
« d’emblée, le célèbre Choral de Bach plongeait l’auditoire dans une méditation mystique. Angelich avait enchaîné avec l’un des derniers cycles de Fantaisies de Brahms, qui alterne des Capriccios volubiles, parfois violents, peut-être désespérés, et des Intermezzos d’une poignante mélancolie. Ici, l’âme du romantisme allemand appartient en propre au grand compositeur, qui laisse souvent parler l’esprit de son maître Schumann.
L’interprète avait utilisé toute la palette de son toucher magnifique, délicatesse ou force. Le premier mouvement de la Sonate 14 de Beethoven connue sous le nom de « Clair de lune » était donné dans un tempo assez rapide qui élevait ce morceau si célèbre au niveau métaphysique, alors que l’Allegretto était pris sans allégresse mais avec beaucoup de poésie.
Dans la seconde partie, Angelich avait joué avec une incroyable profondeur quelques Préludes de Debussy toujours dans des mouvements assez lents, pour en faire comprendre toutes les subtilités, et brusquement, après le petit prélude « Des pas sur la neige » dont il a fait une vaste gravure à la Rembrandt, il a attaqué l’immense Valse de Ravel, rarement donnée au piano solo en partie à cause de ses difficultés techniques, sa complexité harmonique, qu’il a surmontées grâce à ses mains puissantes.
Comme le propose Ravel, c’était un tourbillon délicieux, hommage à la Valse viennoise, qui se termine pourtant par une sorte de cataclysme, sans doute en référence à la première guerre mondiale. Enthousiaste, le public fit au pianiste une longue ovation, récompensée par l’interprétation apaisante de deux Mazurkas de Chopin et de la première Scène d’enfants de Schumann.
Un concert inoubliable par les qualités d’un interprète complet, toujours inspiré, et la perfection de son programme »...

Et Nicholas Angelich reviendra encore l’année suivante sur la côte basque à l’occasion d’un « concert-phare » de la Fête de la Musique au Théâtre Quintaou à Anglet, et à l’été 2020 pour la 8ème édition du Festival Classic à Guéthary...

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