Après plusieurs concerts à Amsterdam au Concertgebouw, c’est le Salon Vert du Sporting Casino d'Hossegor que le Trio Zadig a choisi pour y donner dimanche 19 février à 17 h le programme de leur dernier enregistrement qui rend hommage à Camille Saint-Saëns pour le centenaire de sa disparition (16 décembre 1921).
Si le compositeur avait dirigé « avec feu », selon la critique, sa « Danse macabre » et quelques autres pièces lors de sa tournée à Saint-Pétersbourg à l’invitation de la Société russe de musique, c’est avec un « feu » semblable et leur fougue de jeunesse que l’on entendra interprété par les talentueux musiciens de « Zadig » son Trio n° 2 en ré mineur, op. 92 : Saint-Saëns l’avait écrit en 1892 pour une de ses élèves...
On découvrira également des arrangements de Camille Saint-Saëns pour « Orphée » de Franz Liszt, un poème symphonique parmi ceux que Saint-Saëns avait fait jouer en 1878 à Paris et qui l’inspireront pour en composer lui-même, une nouveauté en France, à l’époque !
Ainsi que des pièces de clavecin de Jean-Philippe Rameau (dans les années 1890, avec Charles Bordes et Vincent d'Indy - fondateurs de la Schola Cantorum - il avait entrepris l'édition des œuvres de Jean-Philippe Rameau, montrant par là son attachement à la musique française).
Pianiste, organiste, chef d'orchestre, Saint-Saëns a laissé une œuvre abondante dans tous les domaines de la création musicale : de la mélodie à la musique de chambre en passant par l'opéra ou la musique pour instruments seuls.
À l'instar des aventures du héros voltairien et poursuivant son exploration du monde de la musique de chambre, le Trio Zadig, nous invite ainsi à découvrir les deux facettes du musicien : l’écriture et la transcription.
Découvert dans la région lors de l'Académie Ravel il y a quelques années, le Trio Zadig mène une carrière internationale ponctuée d'enregistrements originaux.
Récompensé par onze prix internationaux, le Trio Zadig captive le public par sa virtuosité, son élégance et son enthousiasme irrésistible. C’est dans l’amitié que le Trio Zadig puise toute sa force et son authenticité. Boris Borgolotto ( qui joue un violon de 1750 du célèbre luthier italien
Carlo Antonio Testore) et Marc Girard Garcia (sur un violoncelle de Frank Ravatin), véritables amis d’enfance, ont étudié ensemble au Conservatoire National Supérieur de Paris, puis à l’Université de Musique de Vienne. De retour en France, leur route croise celle d’Ian Barber, pianiste américain issu de la classe d’André Watts à l’Université d’Indiana. Entre eux, le courant passe immédiatement, et ils décident d’unir leurs talents pour fonder le Trio Zadig.
Saint-Saëns et Sarasate
En admirateur de la musique basque, je souhaiterais y ajouter un épisode – me semble-t-il, important – dans la vie de Camille Saint-Saëns : son indéfectible amitié avec le grand violoniste et compositeur Pablo de Sarasate que j’avais relatée dans ma biographie « Pablo de Sarasate - Le violoniste basque virtuose » chez Séguier (coll. Carrés Musique, 2001).
Camille Saint‑Saëns qui fut sans doute l'un des plus proches compagnons du violoniste navarrais, relatait ainsi leur première rencontre :
« Je vis un jour arriver chez moi, frais et jeune comme le printemps, Pablo de Sarasate, déjà célèbre, dont un soupçon de moustache ombrageait à peine la lèvre. II venait gentiment me demander, comme la chose la plus simple, d'écrire un concerto pour lui. Flatté et charmé au dernier point, je promis et tins ma parole avec le Concerto en La Majeur (appelé plus tard « Concert Stück »). J'écrivis ensuite pour lui le « Rondo Capricioso » en style espagnol et plus tard le Concerto en Si Mineur pour lequel il me donna les précieux conseils auxquels est dû certainement en grande partie le succès de ce morceau. Ceux qui ont assisté à mes soirées musicales du lundi n'ont pas oublié l'éclat qu'y apportait mon illustre ami, éclat tel que, pendant plusieurs années, aucun violoniste ne voulut consentir à se faire entendre chez moi ; tous étaient effrayés par l'idée d'affronter la comparaison.
Et il n'y brillait pas seulement par son talent, mais par son esprit, la verve intarissable de sa conversation, toujours intéressante et savoureuse... » Rien, semble‑t‑il, ne vint jamais contrecarrer cette indéfectible amitié de Sarasate pour son aîné de neuf ans, comme lui, musicien virtuose dès l'enfance. Au début, Sarasate partageait avec Saint‑Saëns une certaine vie de bohême ; les deux amis hantaient les plus célèbres salons parisiens où on les invitait à jouer des duos dont la seule rétribution était de goûter au somptueux banquet qui concluait le récital. Mais ces agapes alternaient trop rarement avec les périodes plus fréquentes d'abstinence forcée : « une poignée de pommes de terre et une demi‑baguette constituant souvent leur unique et romantique repas ».
Quelques trente-cinq années s'étaient écoulées depuis lors, et Sarasate participait au concert organisé par Saint-Saëns à l'occasion des noces d'or - le cinquantenaire - de sa vie artistique. A l'issue de la manifestation, il reçut ces quelques lignes : « Mon Cher Ami, une des grandes gloires de ma carrière fut de t'avoir eu comme interprète de mes œuvres. Merci d'avoir procuré à cette fête l'éclat éblouissant de ton style, unique au monde et d'avoir inspiré ma seconde et sans doute ultime sonate. De tout cœur, ton ami et artiste, Camille Saint-Saëns ».