Organisé comme chaque été par l’abbé François-Xavier Esponde, le prochain colloque intitulé « L’Histoire en perspective d’avenir - Assise 1986-2019 » qui aura lieu mercredi 7 août prochain (à 15h) à l’église Saint-Laurent fera venir d’éminentes personnalités à Cambo : Mgr Colomb, évêque de La Rochelle, ancien supérieur général des MEP avant de devenir évêque diocésain, Alain Lamassoure, député européen, membre de la Délégation du Parlement Européen pour les relations avec les pays d’Asie du Sud (il avait déjà pris part au colloque de l’année dernière) et Jean-Pierre Bezin, ancien directeur de la Société biblique de Genève.
Selon le pape Benoît XVI, « quand elle est inspirée et animée par la charité, l’action de l’homme contribue à édifier cette Cité de Dieu universelle, vers laquelle avance l’histoire de la famille humaine ». Et pour le pape François, « la paix est le fruit d’un grand projet politique qui se fonde sur la responsabilité réciproque et sur l’interdépendance des êtres humains. Elle est aussi un défi qui demande à être accueilli jour après jour. Elle est une conversion avec soi-même. Elle est une conversion avec l’autre, l’ami, le proche, l’étranger, les souffrants… La paix demeure à parfaire avec la Création, en étant responsable des habitants du monde, citoyens et acteurs de leur avenir ».
Il sera ainsi question de « la Bible, le défi des traductions pour l’avenir. Europe/Asie, les missions chrétiennes de demain. Histoire partagée de la Communauté Européenne en vue du futur ».
A ce propos, et comme en prélude à ce colloque dont il est l’organisateur, l’abbé Esponde de poser la question qu’il estime d’une pressante actualité : « L’Europe serait-elle chrétienne ?
La revue personnaliste Esprit dirigée par Jean louis Schlegel avait proposé en novembre dernier un numéro intitulé : « Une Europe sans christianisme » ?
Elle détaillait la nature du débat et les enjeux de cette interrogation. Et le dernier ouvrage du politologue Olivier Roy s’intitule : « Ce que le Christianisme peut apporter à l’Europe ».
Professant à l’Institut Universitaire européen de l’université de Florence, Olivier Roy souligne : « mes premiers livres ont porté sur le christianisme » et « La sainte Ignorance » (Le Seuil, 2008) avait suscité les débats chez les chrétiens. Aujourd’hui se lève en Europe un débat en faveur du christianisme pour l’opposer à l’islam ».
Mais selon Olivier Roy, le problème de l’islam en Europe est l’arbre qui cache la forêt. « Ce n’est pas l’islam qui a vidé les églises, et les catholiques en France n’ont pas manifesté contre l’islam, mais contre le mariage pour tous. Alors se pose à nouveau la question de l’identité chrétienne en Europe ».
Les Européens se reconnaissent chrétiens dans une déchristianisation effective.
« Depuis 1968, l’Europe connaît un changement anthropologique majeur qui sépare profondément les valeurs chrétiennes de celles de la société. Le désir individuel est contraire au christianisme... Excepté l’Angleterre anglicane, une majorité d’Européens continue à se dire chrétiens. Cela n’a rien à voir avec la Foi, car on constate une ignorance totale des éléments de base du christianisme. En se fondant sur une identité chrétienne sans se référer aux valeurs chrétiennes on accélère la déchristianisation. En ne se fondant plus sur la Foi, ceux qui veulent promouvoir des racines chrétiennes, s’éloignent de la religion »...
Et Olivier Roy de souligner : « Les courants populistes ne se reconnaissent pas dans un ordre moral mais veulent faire face à l’islam. Les épiscopats allemand, italien, polonais l’ayant bien perçu, ont su prendre des distances avec les partis populistes qui réclamaient des croix dans les espaces publics. Le populisme folklorise la religion et finalement exclut de l’espace public la religion chrétienne. Deux papes, Jean-Paul II et Benoît XVI l’avaient bien compris, mais l’Eglise catholique continue de se réclamer de ce lien entre la culture et la foi ».
De facto, en Europe aujourd’hui, « on vit une crise culturelle beaucoup plus qu’une crise religieuse dont le salafisme et l’évangélisme sont les vitrines visibles des appartenances de leurs fidèles ». Une situation douloureuse pour les catholiques qui s’interrogent sur le comment se situer comme tels dans la société.
Trois Mouvements italiens laiques de renom, Sant’Egidio, les Focolaris et Communion et Libération expliquent que le catholicisme doit arrêter d’intervenir à partir de la normativité de la Foi et proclamer haut et fort les valeurs. « On ne saurait reconquérir religieusement la société et passer par la révision des normes, IVG, mariage pour tous, qu’en apportant son concours aux partis populistes, mais les populistes savent qu’ils ne pourront revenir sur ces lois que ces derniers ont déjà adopté comme tout un chacun.
Les chrétiens doivent apparaître de la sorte comme des prophètes plus que des législateurs, car les Européens ont besoin désormais de référence morale basée sur des valeurs et non plus des normes conflictuelles. Pour éviter par la sorte les formes nihilistes de l’anarchie, les théories apocalyptiques, le transhumanisme, le déclin des droits humains ou le terrorisme religieux et violent » (Olivier Roy).
Si le projet européen fut pensé par des chrétiens, il s’agira de revenir à l’esprit chrétien qui l’anima depuis ses origines. Et l’Eglise doit reprendre le magistère moral et non vouloir un programme législateur qui s’apparenterait à du lobbying politique !
Olivier Roy propose une réflexion dense, opportune à la veille des élections prochaines du 26 mai 2019 à tous ceux qui veulent connaître la portée de ces enjeux européens du temps qui vient.