Comme son nom l’indique, la Toussaint est la fête de tous les saints. Ce vendredi, comme chaque 1er novembre, l’Église honore ainsi la foule innombrable de ceux et celles qui ont été de vivants et lumineux témoins du Christ.
Le lendemain, samedi 2 novembre, au lendemain de la Toussaint, l’Église catholique commémore les fidèles défunts. C’est l’occasion de se recueillir sur la tombe de ses proches et de les fleurir, en signe d’espérance en la vie éternelle. Voici un très beau témoignage de notre confrère et ami Yves Ugalde que nous reprenons de son site FB. ALC
Je déjeunais hier avec une dame qui m'a fait la confidence de son pèlerinage déjà entamé de la Toussaint. En femme organisée, elle a planifié ses visites à ses morts et a donc commencé dimanche dernier par le Béarn. Arthez-de-Béarn, et, plus précisément encore, la chapelle romane du Cagnés.
Alors qu'elle me racontait le plus naturellement du monde son déplacement dominical, j'avançais déjà dans l'écriture de ce billet, tant l'histoire m'a semblé jolie. Illustration parfaite de ce que nous considérons comme des gestes entrés dans la banalité de nos habitudes peut avoir de beau tout simplement.
Cette chapelle, ancienne église, autour de laquelle sont enterrés les défunts béarnais de sa famille, elle en parle comme d'un pan de son propre patrimoine familial. Elle est un peu sa maison depuis qu'avec sa famille elle y consacre l'énergie d'une association de sauvegarde dont les modestes contributions financières visent à en entretenir la préservation.
Rien de vraiment remarquable au sens où les conservateurs du patrimoine sacré peuvent l'entendre, mais tout de précieux pour elle qui est allée se recueillir dimanche encore sur la tombe de ses parents, sûrs avant de mourir qu'ils seraient souvent visités, disaient-ils, tant l'endroit est paisible et charmant.
La polémique autour des 5 euros de Rachida Dati pour aller visiter Notre-Dame de Paris est venue effleurer mon esprit et un timide sourire a balayé mes lèvres en écoutant la dame parler de cette modeste chapelle béarnaise pour laquelle elle aura donné et donnera encore beaucoup plus, seulement parce qu'elle a un sens fondamental pour elle.
Accolé au bâtiment, un parterre multicolore de chrysanthèmes de l'année précédente, cultivé par un jardinier premier voisin de l'édifice. Il est aidé dans son œuvre par le pécule de l'association de veille.
La Toussaint passée depuis trois bonnes semaines, l'homme ramasse les fleurs fanées, les étête, et les replante. Là, juste à côté du cimetière. Vient ensuite une opération sensible de renaissance, fondée sur la maîtrise d'un compost et de sa répartition autour des plans considérés comme perdus dans toutes nos villes.
Formidable symbole, sur ce lopin consacré aux morts, que cette seconde vie rendue à des fleurs dont on a trop tendance à penser qu'elles ne sont pas faites pour l'honorer. La dame m'a montré une photo de ce jardin du renouveau ouvert à tous les visiteurs sans le sou, ou, mieux encore, aux bénévoles qui peuvent ainsi fleurir les tombes qui n'ont plus d'amis ou de proches qui s'intéressent encore à elles.
Est-il possible de donner plus de sens à la fête des morts qu'en ravivant ainsi des fleurs classées comme perdues partout ailleurs, et en allant ensuite les glisser dans des vases secs depuis longtemps. Pas de prière personnalisée, encore moins de nostalgie aimante, mais peut-être plus encore dans cette coutume désintéressée et anonyme.
Vous m'excuserez, mais ça a pour moi une autre portée d'âme que les agitations surmédiatisées d'un Halloween de pacotille. Pas de morts vivants à Arthez de Béarn, mais des morts plus que jamais dans nos vies...