Après avoir été présentée pour la première fois au musée Thyssen-Bornemisza à Madrid, la rétrospective d'Auguste Renoir (Limoges, 1841 – Cagnes-sur-Mer, 1919), continue son périple au musée Bellas Artes de Bilbao.
Cette exposition rassemble plus d'une soixantaine d'œuvres caractéristiques du style de Renoir, provenant de divers musées et collections à travers le monde, tels les musées Marmottan ou Picasso à Paris, l'Art Institute de Chicago, la National Gallery de Londres, le Metropolitan Museum of Art à New York ou le Musée Thyssen-Bornemisza à Madrid, entre autres.
Parmi ses tableaux emblématiques, les portraits déshabillent l'âme des personnages à l'image de celui de Claude Monet (1873), un tableau à la touche sensible et vive qui correspond à la période impressionniste (1864-1883). Saisi au vif en train de fumer, Monet est entièrement absorbé dans la lecture de son journal, de manière à laisser entrer le spectateur dans l'intimité du personnage. A cette époque, les deux artistes fréquentaient un lieu peu canaille, l'établissement de bains « La Grenouillère » (1869) que Renoir peignit en plein air, une toile charnière.
Une dizaine d'années plus tôt, Auguste Renoir, originaire de Limoges où ses parents étaient artisans, avaient quitté sa ville natale pour étudier à l'Ecole des Beaux-Arts à Paris, dans l'atelier de Charles Gleyre, en même temps que son ami Edouard Monet. Ils furent rejoints par Alfred Sisley et Frédéric Bazille. Ensemble, le groupe de futurs impressionnistes s'évadait afin de croquer les rochers de la forêt de Fontainebleau.
Cependant, Auguste Renoir n'était pas satisfait. Lors de sa première exposition, l'artiste exposa avec succès le tableau « Esmeralda » que détruisit peu après.
Durant cette période impressionniste, Auguste Renoir mettait en relief la pâleur accrue de ses personnages, leur volume, la matière, la texture de la peau ou d'une chevelure. Son attention se concentrait sur la gestuelle d'un modèle en plein air dans la nature telle « La femme au piano » (1875-76), collection du Art Institute of Chicago) vêtue tout de noir et blanc en accord avec les touches du piano. De même, « La femme à l'ombrelle dans un jardin » (1875, collection Musée Thyssen-Bornemisza) au pointillisme fleuri évoque tout en poésie ces scènes de plein air, dans la nature.
C'est à cette époque (1880) qu'Aline Charigot devint sa maîtresse (succédant à son modèle Lise Tréhot) avec qui il eut deux enfants, Pierre et Jeanne. En 1890, Auguste Renoir épousait la jeune modiste qui posait également pour lui. Ils auront trois enfants, Pierre, Jean (le cinéaste) et Claude (dit Coco).
La période "ingresque" ou "sèche"(1883-1890).
En 1881, suite à la vente de plusieurs toiles, Auguste Renoir voyagea en Italie et découvrit les maîtres florentins et la Renaissance italienne avec Raphaël, Léonard de Vinci. Dès la fin 1881, il écrivit au marchand d'art Durand-Ruel: « Je suis encore dans la maladie des recherches. Je ne suis pas content et j'efface, j'efface encore »...
Dès lors, il prit ses distances avec le groupe des impressionnistes et entreprit de renouveler son style en référence à la tradition classique du dessin, sans abandonner complètement le langage impressionniste. C'est la période dite « ingresque » (1883-1890), dont le tableau emblématique « Les Grandes Baigneuses » (1887) marqua l'étape. L'artiste recherche davantage les effets de lignes, les contrastes marqués, les contours soulignés, comme dans le « Déjeuner des canotiers » (1880 - 1881) représentant Aline assise à gauche, et en face d'elle le peintre et mécène du groupe, Gustave Caillebotte. Les contours de ses personnages deviennent plus précis et ses aplats plus uniformes. L'artiste est alors critiqué par le public qui considère son style trop sec.
La période dite "nacrée" (1890-1897)
Renoir apporta davantage de volupté à son trait devenu trop rigide. Ni impressionnisme, ni ingresque, le peintre annonçait sa période dite « nacrée » en mélangeant les deux tendances à la manière de "la baigneuse" bien que réalisée en 1905.
En 1914, déjà âgé, il s'adonna à la sculpture. Les mains terrassées par les rhumatismes, avec l'aide du sculpteur Richard Guino, Auguste Renoir réalisa diverses sculptures, dont « Le jugement de Paris ». En 1915, en hommage à son épouse décédée, l'artiste réalisa un bouquet de roses.
A cet égard, le cinéaste Jean Renoir avait écrit sur son père : « Renoir était extrêmement pudique et n'aimait pas révéler l'émotion qui le bouleversait tandis qu'il regardait les fleurs, les femmes, les nuages du ciel, comme d'autres hommes touchent et caressent ». Ainsi, au regard d’un impressionnisme purement visuel, les peintures de Renoir améliorent les aspects sensoriels spécifiques au toucher, un aspect perceptible dans tous les genres qu'il a illustrés, portraits, nus et scènes de groupe jusqu’aux paysages et aux natures-mortes.
Cette exposition, unique en son genre, rapprochera des œuvres de Renoir actuellement dispersées dans le vaste monde.
A partir du 7 février jusqu'au 15 mai au Musée Bellas Artes de Bilbao, « Renoir : intimité », ouvert du mercredi au lundi, de 10h à 20h (fermé le mardi).
Samedi 25 mars, l'association des Amis d'Arnaga organise une visite de l'exposition Renoir à Bilbao, associée à celle de la collection Rupf au Guggenheim (Picasso, Braque, Gris, Léger, Klee Kandinsky) avec déjeuner inclus au club privé "Sociedad Bilbaina" et bus au départ de Cambo et Bayonne .(inscriptions au tél. 06 64 79 23 64 ou cle.perret@orange.fr).
Anne de Miller La Cerda