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Conférence de la semaine
Bayonne : redécouvrir Ramiro Arrue, artiste basque célèbre et méconnu, par O. Ribeton
Bayonne : redécouvrir Ramiro Arrue, artiste basque célèbre et méconnu, par O. Ribeton

Bayonne : redécouvrir Ramiro Arrue, artiste basque célèbre et méconnu, par O. Ribeton

La Société des Sciences, Lettres et Arts de Bayonne organise une conférence le mercredi 13 mars à 16h30 à la Peña Taurine Côte Basque, allées Marines à Bayonne : "Redécouvrir un artiste basque célèbre et méconnu Ramiro Arrue (Bilbao 1892 – Saint-Jean-de-Luz 1971)" par Olivier Ribeton, conservateur en chef honoraire du Musée Basque et de l’histoire de Bayonne, commissaire de plusieurs expositions consacrées à l’artiste.

Les fortes enchères obtenues aujourd'hui par les œuvres de Ramiro Arrue peuvent surprendre après une période de relatif oubli qui suivit sa mort. Depuis que le Musée Basque a acheté la plus grosse partie du fonds d'atelier en 1990, la cote de l'artiste s'est envolée sans que le public ne connaisse vraiment le véritable caractère d'un homme sensible et discret de son vivant. La dernière grande exposition monographique consacrée à l'artiste basque depuis sa mort fut présentée à l'Espace Bellevue à Biarritz en 2017 ( 1) . La première avait été organisée par le Musée Basque en 1991 à Bayonne. La seconde en 1996 au Musée national du château de Pau. Les catalogues parus alors essayaient de mieux cerner la personnalité de Ramiro Arrue et d'étudier une œuvre très dispersée, le Musée Basque s'attachant à recenser les collections publiques françaises et la documentation disponible ( 2) , le château de Pau ( 3) cherchant à remplacer l'artiste dans l'histoire générale de l'Art avec des contributions très éclairantes sur le goût et le style de Ramiro en résonnance avec son époque riche de toutes les révolutions picturales. Une exposition plus modeste et à thématique plus générale, « Regards sur le Pays Basque » au Musée des Arts décoratifs de Bordeaux en 1996, permettait de publier un très beau témoignage de Jean-Luc Tobie, voisin de palier de Ramiro Arrue à Saint-Jean -de-Luz, décrivant le cadre familial de l'appartement transformé en atelier à la fin de sa vie et surtout expliquant la méthode de travail d'un artiste scrupuleux qui composait ses sujets avec le souci de l'exactitude documentaire. 

La conférence d’Olivier Ribeton souligne le paradoxe d’un peintre qui commence sa carrière au milieu de l’Avant-garde parisienne, proposant ses sujets dans une palette moderniste remarquable, et qui la termine selon ses détracteurs en illustrateur régional de la Tradition basque. Citant « cette presque pathétique préoccupation de la multiplication de l’image de son œuvre » dans ses dernières années, Jean-Luc Tobie confie : « On lui avait tellement dit, ce qui le mettait en colère du temps de sa fougue, qu’il était un illustrateur, qu’il avait fini par le croire. Ne préférait-il pas plutôt vivre de cette imagerie, qu’il dispensait et ancrait dans le goût ? » (4) En exposant en 2003, les principaux tableaux de Ramiro Arrue appartenant à la collection municipale de Saint-Jean-de-Luz, le Musée des Beaux-Arts d’Alava, à Vitoria, essayait de réconcilier les Basques péninsulaires avec cet artiste qui n’avait pas voulu revenir s’installer à Bilbao après ses études parisiennes. Les provinces du Sud privilégient encore aujourd’hui l’œuvre des trois autres frères de Ramiro : Alberto, José et Ricardo, restés plus « espagnols » et sans doute plus âpres dans l’ethnicité basque. Comme l’écrit Jean-François Larralde, « dans la peinture de Ramiro Arrue, il se dégage une mystique de l’innocence originelle associée à la conception d’un âge d’or archaïque. » (5)

Chez le « doux et timide Ramiro », le balancement entre la modernité du style et la tradition du sujet répété à l’infini sert de fil conducteur à son œuvre. Les principaux jalons d’une vie riche seront retracés et nous autorisent à porter un jugement plus nuancé sur l’artiste devenu une icône de la peinture basque.

Natif de Biscaye, formé à Paris, mais retourné au pays par atavisme, et plus particulièrement à Saint-Jean-de-Luz – Ciboure par goût, Ramiro Arrue assure une passerelle entre les deux Pays basques d’Espagne et de France. Membre de l’Association des Artistes basques de Bilbao depuis 1916 (il en est le secrétaire en 1919) et du groupe des Neuf à Ciboure en 1917, Ramiro aurait pu jouer le rôle de chef de file de la peinture basque car il expose avec succès ses œuvres à Paris, Londres ou en Amérique latine (Buenos Aires, Córdoba, Montevideo) et connaît bien les milieux artistiques français et espagnol. Marqué par le conflit aigu entre art académique et art moderne, il cherche une troisième voie qui maintienne une image claire, visible et classique du sujet tout en renouvelant l’expression formelle. Intéressé par les révolutions esthétiques, il s’en tient raisonnablement éloigné en choisissant un régionalisme délibéré comme source d’inspiration ; quitte à flirter sagement avec certains « ismes », principalement le cubisme et le symbolisme, atteignant parfois une qualité d’invention majeure. Ramiro Arrue le Basque trace son sillon pictural avec une telle constance et une telle conviction qu’il aurait mérité de faire école (6). Paradoxalement Ramiro Arrue n'est pas exposé de façon permanente au Pays Basque, mais fait l’objet d’un musée presque monographique à la Villa Les Camélias à Cap d’Ail, voisin de Monaco, où la collection privée Maria de Isasi (7) met en valeur les créations multiples de l’artiste : peintures, gouaches, émaux, objets décoratifs, arts du spectacle, archives, documents divers…

Photo de couverture  : Olivier Ribeton présente sa conférence sur Ramiro Arrue à Bilbao
Références :
(1) RIBETON O., Ramiro Arrue (1892-1971) / Entre Avant-garde et tradition, Biarritz, 2017, 276 pages.

(2) RIBETON O., Ramiro Arrue (1892-1971), un artiste basque dans les collections publiques françaises, Musée Basque et J&D Éditions, 1991, 328 pages.

(3) MENGES C. (sous la direction), Ramiro Arrue (1892-1971), terre d’avant-garde, terre ancestrale, Musée national du château de Pau 1996, 144 pages. 

(4) DU PASQUIER J. (sous la direction), Regards sur le Pays Basque, Musée des Arts décoratifs de Bordeaux, FRAM - ACMA n° 11, 1996, p. 9.

(5) SANCRISTÓBAL Y MÚRUA P. (sous la direction), Ramiro Arrue Donibane Lohizuneko Bilduma / Colección de la villa de San Juan de Luz, Arabako Arte Eder Museoa / Museo de Bellas Artes de Ȧlava, 2003, p. 36, 37, 78.

(6) RIBETON O., « La peinture basque existe-t-elle ? », in HUREL A. et JAUREGUIBERRY M. de, Un siècle de peinture au Pays Basque (1850 – 1950), Pimientos, Urrugne, 2006, p. 16.

(7) RIBETON O., Ramiro Arrue / Peintre basque / Collection Maria de Isasi, Cap d’Ail, 2022, 226 pages.

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