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Tradition
Trois fêtes mariales en août
Trois fêtes mariales en août
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| Jean-François Esponde 1226 mots

Trois fêtes mariales en août

On célèbre sans doute Marie - Mariam en Orient - tout le long de l’année.
Mais au cours de ce mois d’août, Marie est rappelée par trois fois à la dévotion des fidèles qui se comptent parfois plus nombreux dans les sanctuaires consacrés à la Noble Dame que dans les églises. Le nombre des basiliques, des églises, des chapelles, des couvents consacrés à la Mère de Jésus est particulièrement dense en France, pays d’usage singulier quand il s’agit comme par précaution de ne verser ni dans l’apologie ni les croyances et les superstitions !

1 - L’été, sous le soleil le plus ardent du ciel qui conduit au farniente, à la diversion et aux ballades champêtres, Marie a trouvé à Rome tout d’abord par la Dédicace de Sainte Marie Majeure l’église fondatrice de cet usage au lendemain du Concile d’Ephèse en 431, en évitant de froisser l’âme orientale qui reconnait la Mère de Jésus mais se préserve de la déifier ou de la comparer à Jésus Fils de Dieu. Cette basilique est une merveille d’art, d’imagination humaine, de réhabilitation séculaire, comme s’il fallait sans cesse la livrer à l’esthétique de l’intelligence insatisfaite de ses propres créations. Théotokos ou l’icône de la Vierge à l’Enfant connue sous le nom de Salut du peuple romain est placée en cette basilique majeure de la ville éternelle. Marie mère du Christ tient Jésus sur ses genoux comme toute mère porte son enfant dès sa naissance, fixant les visiteurs et donnant à tous ceux qui le contemplent la promesse du salut...

Ne dites pas que la dévotion mariale est née à Rome, elle fut bien plus ancienne chez les chrétiens d’Orient et trouva au fil de l’histoire chrétienne une dimension universelle qui ne retire ni à l’Orient ni à l’Occident le bénéfice spirituel de cette louange et de sa reconnaissance.

2 - L’Assomption ou fête du 15 août élève nos regards vers la Jérusalem céleste où Marie, la première des sauvés, nous précède. Sans oublier la Jérusalem d’en bas qui brûle dans le cœur et la Foi des fidèles de l’Alliance, torturée et souvent blessée par l’histoire des désunions qui pénalisent le désir d’unité des chrétiens eux-mêmes et les rapports avec les représentants des autres confessions monothéistes. La lumière de la Pâque de l’été est resplendissante, dans ses effusions et ses expressions spirituelles.

Vivre le quotidien d’ici et le regard de l’Au-delà sont bien le propre de l’esprit des humains qui savent la valeur du temps qui passe et celle du temps qui viendra !

3 - Il est encore une autre manifestation mariale postérieure et plus contemporaine. Le Couronnement de Marie, que des générations et des générations anciennes transmirent avec une fidélité particulière. Marie, reine des anges et reine des hommes, qui illustra divinement l’art religieux d’un temps passé. Car Marie porte dès la naissance de son Fils la couronne tressée au fil de sa vie pour servir le peuple qu’elle a mission d’honorer. Une couronne d’abnégation, de foi, de service, d’obéissance, de silence, de fidélité d’une vie ajustée à Dieu que l’on pose sur la tête de jeunes enfants lors des rites d’initiation à la foi chrétienne, lors des mariages, de vœux dans des monastères, ou que des traditions séculaires relaient dans le temps pour ne jamais s’éloigner du symbole d’éternité de toute vie conformée à la mission reçue de cette Mère dans la Foi.

Ne sourions pas de la transparence de ces rites initiatiques, ils donnèrent naissance dans bien des cas à des vocations matures d’engagement public dont certaines reines de monarchies du passé constituèrent des exemples pour les sujets de leur royauté !

 

Comment naît la Tradition

Marie et sa mort ne sont nullement mentionnés dans les Evangiles, sinon dans des textes apocryphes qui perpétuent savoureusement les cultes adressés à la Mère de Jésus au fil du temps.

En 373, saint Ephrem, esthète et poète, vibrant adorateur de Marie, fait chanter sa lyre et sa voix au son de la lumière mariale et déclare à sa mort que le corps de Marie demeura intact, et donc non soumis à la destruction. Toujours au IVème siècle, Epiphane de Salamine s’interroge sur cette fin de Marie et propose des hypothèses. Elles nourriront le désir de comprendre et les discussions vives des fidèles à propos de Marie. Grégoire de Tours, dans son livre apocryphe « Transitus Mariae », entretient le mystère et les questionnements, car la dévotion mariale est ardente et ne se tarit pas : on dit même que par la grâce divine, Marie fut déposée au Mont des Oliviers auprès du lieu mémoriel de son Fils - mort en ce lieu sacré pour l’histoire – et entourée lors de cette déposition par les apôtres de Jésus, sauf Thomas arrivé en retard au rendez-vous, et demandant à voir la sépulture pour la trouver vide..!

Nous sommes en Orient, et rien de ce qui demeure sacré n’est l’objet de commentaires déplacés !

Gélase Ier prendra soin de compiler en 495-96 des textes apocryphes perpétuant ainsi le culte à Marie et les traditions séculaire qui fleurissaient dans l’Eglise des premiers siècles en Orient. Jean Damascène nourrit le récit littéraire d’un conte savoureux illustré. L’empereur Martien et la reine Pulchérie, demandent à connaître où repose le corps de Myriam et, comme rapporté par les Syriaques à Ephèse dès le IXème siècle, on relate que Marie accompagna Jean à Ephèse où selon la tradition, Marie reposerait en cette ville...

Le dogme de l’assomption en 1950

Après quatorze siècles d’une mémoire soutenue de Marie en Orient, les Occidentaux que nous sommes mettront le temps d’ingérer lentement cette espérance de la foi portée par les chrétiens de l’autre rive et que le pape Pie XII associa en 1950 à la déclaration publique de l’Assomption sous le titre de Dogme de l’Assomption demandée entre 1854 et 1945 par des milliers d’évêques, de prêtres et de fidèles qui écrivirent pendant tout un siècle au pape afin d’obtenir cette officialisation de la fête ! Il se dit que le pape ayant requis le vote des évêques, 90 % d’entre eux soutinrent cette décision. Mais si les catholiques acquiescèrent nombreux, les réformés exprimèrent des réserves qui nourrissent aujourd’hui encore des discussions théologiques entre les églises au sujet de Marie. Quant aux orthodoxes, la date du 15 août correspond chez eux à la fête de la Dormition de la Mère de Dieu et donne lieu à de nombreuses processions, dévotions et prières dans l’Orthodoxie.

Finalement, chez les Catholiques, le Dogme de l’Assomption fut déclaré objet de Foi de l’église le 1er novembre 1950. Cette fête estivale inspire les célébrations du ciel par des feux d’artifice sublimes, comme à Biarritz, ainsi que des processions mariales (en particulier celle du « Vœu de Louis XIII » à Saint-Jean-de-Luz – voyez en rubrique « Histoire »), des bénédictions de la mer, des marins et de tous ceux qui pratiquent la navigation. Il n’est que de rappeler en Espagne le mystère d’Elche, les feux d’artifice en Corse, ainsi que les innombrables dévotions en Pologne, chez nous à Lourdes, en Italie, au Portugal, et dans le monde entier, pour ne pas douter un instant de la force spirituelle de cette mémoire ancrée dans les esprits des fidèles. La Bonne Mère des uns, « Zeruko Ama Birjina » des autres, Marie demeure toujours la même dans la déclinaison du vocabulaire enlevé au ciel de nos vies, habitées par ce mystère !

 

François-Xavier Esponde

 

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