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Tradition
Saturne, maître du temps et du cosmos
Saturne, maître du temps et du cosmos

| François-Xavier Esponde 841 mots

Saturne, maître du temps et du cosmos

Selon la mythologie antique, Saturne conserve de par sa nature spécifique un caractère atypique.

Pour un astrologue, la sixième planète du système solaire - mais seconde par la taille et la masse après Jupiter - demeure la planète géante et gazeuse du cosmos.
Pour un maître du temps et des horloges, la journée sur Saturne dure 10 h 33 mn, 38 secondes ! De quoi se poser quelques questions astro-physiques (Mission Cassini).
Mais pour renouer avec la mythologie antique de nos aïeux grecs et romains, l'observation céleste leur permit d'attribuer à Saturne une mission particulière, celle des Saturnales ou fêtes romaines de décembre, d'une année qui va et présage de la suivante qui renaît.

Ce "deus otiosus" - dieu endormi - réserve cependant bien des surprises au déroulé d'un culte à Saturne dans ce monde méditerranéen ancien.

Saturne est représenté dans un habillage enrubanné de bandelettes, croyance en un dieu attaché au rythme du temps et du Cronos grec, peu disposé aux libéralités et contraint par les dieux à ses missions souveraines.
Les anciens romains paysans du Tibre lui vouaient une adoration illimitée.
De lui dépendaient les bonnes récoltes céréalières de l'année, si importantes pour alimenter les campagnes militaires.

Dieu védique disait-on, dispensateur et dévoué à ses fidèles, représenté comme un vieillard muni d'une faucille, courbé sous le poids de l'usure du temps, vénérable et vénéré par ses sujets !

A Rome le Temple de saturne est sur le Capitole.
A sa statue est lié "l'aerarium", comprenez le trésor du temple nourri par les nombreuses campagnes étrangères, d'une statue attachée jusqu'en décembre où lors des saturnales, la divinité reprenait du service et de l'indépendance.

Les sacrifices les plus antiques à sa divinité rappellent ceux des enfants nouveaux-nés, souvent de peu de civilité, objet d'une hostilité avérée des chrétiens contre de telles pratiques impériales barbares. Carthage en la partie africaine de l'empire où se livraient de telles pratiques jusqu'au IIIème siècle, diront les chroniqueurs du temps.

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"Saturne dévorant son fils" par Goya ©
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Le culte à Saturne était célébré "capito non velato", tête découverte. A Pompéi on a noté une représentation de Saturne de blanc vêtu, comme un dieu souverain, mais Plutarque dira cependant, "Saturne est voilé car il incarne encore le visage de la vérité !"
Un roi égalitaire lors de la trêve des saturnales de fin d'année, donnant aux esclaves quelques libertés, et rappelant le désir civilisationnel de l'Empire, en faveur des populations soumises du royaume que des dispositions impériales pouvaient affranchir !

Les Romains se rendaient sur l'Aventin pour célébrer le crépuscule de l'année, comme les chrétiens le feront plus tard avec les festivités de Noël en vue du nouvel-an.
On y célébrait les offrandes de gladiateurs sommairement barbares, car Saturne dévorait lors de ces combats mirifiques des sujets sacrifiés à ces cultes sauvages et primitifs.

Le dieu Cronos grec se reconnaît en saturne romain. Tous deux exercent leur pouvoir sur le temps et le destin des hommes, Saturne demeure une divinité disputée et disputante avec les autres compétiteurs du cosmos..
La littérature grecque sur ce déroulé mythologique inachevé demeure la source providentielle des auteurs   latins qui s'en inspirent pour leur propre récit.
Les saturnales donnent le sentiment inachevé d'un royaume passé d'un jardin de délices perdu, empreinte de nostalgie. Vestiges de croyances antiques que les latins aimaient ajouter à leur panthéon syncrétique et particulier.
Les poètes Ovide - "Fastes",  Virgile - "Eneide", Cronos - "Saturne", entretiennent ce déroulé mythologique inspirant l'imaginaire latin d'une société en attente de destin ?

Les artistes peintres ont souvent repris le thème de Saturne dévoreur de ses propres enfants, comprenez que le destin reprend toujours ses postérités un jour du temps ! Comme mentionné, Carthage - ville impériale romaine - avait encore des pratiques barbares autour du culte à saturne des temps immémoriaux.
Les peintres Rubens, Goya et Le Caravage s'en sont inspirés.
Dans la sculpture, la littérature, la musique, le cinéma,  les artistes se sont identifiés à Saturne dans leurs créations. 
"Un anthropomorphisme quasi spontané permet à chacun de donner un visage à Saturne céleste en une représentation terrienne et le trait typique d'un sujet imaginaire en butte avec ses pairs d'un côté et des forces astrales de l'autre."

Saturne détenteur des clefs du temps et de l'accès aux royautés astrales de l'univers selon Maier, est encore un thème reçu des profils accordés à cette incarnation astrale de diverses apparences.
Et pour donner un résumé alchimique à Saturne, on lui prête une capacité de s'apparenter dans le plomb chauffé au feu donnant de la matière dorée, aux origines  du soleil et du feu céleste ?
Comprenez la communion ciel et terre semblait légitime pour un ancien voué aux cultes des divinités panthéistes sur terre, astrophysiques dans le cosmos.

Une étape suivante attendait les humains avec l'arrivée du monothéisme qui chahuta sévèrement ces croyances matérialistes enkystées dans les coutumes méditerranéennes.
Mais le règne de Saturne et des saturnales ne prévoyaient encore cette évolution qui se fit avec le temps et la conversion progressive de l'Empire à des cultes civilisationnels moins rudes ou barbares.
Les judéo chrétiens assurèrent cette transition !

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