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Artisans d'Art
Liliana Rubio, architecte et céramiste d’art
Liliana Rubio, architecte et céramiste d’art

| Manex Barace 1989 mots

Liliana Rubio, architecte et céramiste d’art

Native de Bogota, Liliana Rubio immigre en France en 2008, à Saint-Jean-de-Luz. Devant l'impossibilité de faire reconnaître en France son diplôme colombien et son expérience d'architecte, elle utilise sa deuxième passion pour se reconvertir : la céramique d'art.
Elle puise alors son inspiration à la fois dans la richesse de sa culture sud-américaine mais également dans la beauté de la corniche basque dont elle découvre la richesse graphique et dont elle apprécie particulièrement la variété des textures, la géométrie...

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Album consacré à Liliana Rubio ©
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Dans ce livre, elle nous présente l'étendue des sujets abordés depuis une dizaine d’années dans ses céramiques émaillées.

« Jamais je n’oublierai le jour où je me suis inscrite à un cours de céramique en grès. C’était en 1990, je travaillais alors comme architecte dans le Bureau d’architecte dirigé par mon professeur d’université le plus reconnu. Il m’a, d’emblée, autorisée à m’absenter quelques heures par semaine et j’ai découvert alors ce monde passionnant qu’est la fabrication de céramiques en grès à haute température.

J’ai appris le métier dans une usine de céramique connue de Bogota, créée par un artiste anglais et on n’y travaillait que du grès et des émaux à haute température. Ma première pièce, que je conserve encore, est un vase sciemment non émaillé à l’extérieur, afin de mettre en valeur la texture obtenue et révélant déjà mon intérêt à faire valoir la matière brute.

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Liliana Rubio dans son atelier.jpg ©
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Mon parcours a été jalonné par des faits qui m’accompagnent encore. J’ai commencé mes études universitaires à Bogota, où je suis née, et j’ai étudié pendant un semestre les Mathématiques pour me diriger ensuite vers des études d’Architecture. Durant cette période, j’ai ressenti un intérêt particulier pour la composition. La géométrie, la relation entre le point, la ligne, le plan, le volume ainsi que les formes pures m’ont beaucoup intéressée et je me suis découvert des aptitudes et une habileté certaine dans la fabrication de maquettes. La connaissance des différents matériaux, la planification et enfin la mise en exécution m’ont aussi permis de mesurer mon sens de l’effort et ma concentration.

Après avoir travaillé pendant cinq ans dans le Bureau d’architecte de mon professeur, j’ai exercé pendant 20 ans à Bogota comme conceptrice et j’ai eu alors occasion de mener à bien divers projets d’architecture notamment dans le logement. Celà m’a aidée lorsque, 30 ans après –en 2019- , je me suis décidée à créer à Saint-Jean-de-Luz mon entreprise de Céramiste d’art.

En 2008, notre famille a décidé de venir s’installer en Europe et le hasard nous a mené à Saint-Jean-de-Luz, ville dans laquelle je réside et dans laquelle je me suis décidée à créer ma propre entreprise. Il est vrai que la validation de mes études d’architecte réalisées en Colombie n’a pas été une tâche facile et ces embûches ont provoqué un second changement radical après le fait d’avoir quitté ma ville natale. J’ai dû me réinventer, apprendre une nouvelle langue et réorienter mon chemin vers ma deuxième passion : la céramique. Mon travail et mes réalisations auront donc à cœur de manifester mon souci constant pour la beauté, la pureté des formes, l’esthétique, l’harmonie.

Mon atelier de céramique créé en 2014, occupe la maison basque datant de 1914 que nous avons acquise et rénovée. Cette réalisation constitue pour le moment mon seul projet d’architecture ici en France. Le Pays Basque, mon nouveau lieu de vie m’a immédiatement charmée et en particulier la côte, les falaises….

Peu après mon arrivée en Europe, j’ai découvert l’Atelier Municipal de céramique d’Irun (Espagne) et c’est là que j’ai fabriqué les premières pièces de mon Catalogue.

En cherchant à être exposée dans une galerie de Saint-Jean-de-Luz, en 2017, une conversation avec Boris Solin, galeriste de BLEU, la galerie spécialisée dans les représentations du monde maritime au sens large, a abouti à la série FLYSCH. Cette série est dédiée à la formation géologique unique qui borde la côte du pays basque. C'est une série qui fusionne la sculpture et la mer.

Après deux expositions dans la Galerie Ilargi Urdina de Saint-Jean-de-Luz en 2019 et 2020, galerie disparue depuis, j’ai eu l’honneur d’être recrutée parmi les artistes partenaires de BLEU, la galerie et d’y exposer mes œuvres depuis décembre 2021.

Toujours actuelle, la Série FLYSCH ouvre des voies infinies. Il m’est possible en effet de réaliser des pièces à différentes échelles, tailles et formats (pièces à accrocher au mur, sculptures, céramiques murales d’intérieur ou d’extérieur, pièces réalisées en plongée sur les falaises ou depuis un bateau longeant la côte et enfin, une vue détaillée de rochers qui constituent les falaises). La Série composée de 300 pièces uniques ne cesse donc de croître. C’est ma manière de traduire mon admiration et ma reconnaissance pour cette région, sa nature, son patrimoine.

Les fresques murales sont le résultat de diverses raisons conceptuelles et techniques. D'abord, le charme des reliefs artistiques de la décoration, en pensant aux motifs géométriques islamiques, aux frises et bas-reliefs taillés en pierre, et en particulier à la fresque murale, œuvre d’art de Fernand Léger, qu'il réalisa pour la famille Roux à Saint-Germain Paul-de-Vence. Concernant la technique, la limitation de la taille des carreaux qui ont tendance à se tordre plus ils sont gros et la taille du four qui me permet un maximum de 25 x 25 cm. La réalisation d'une œuvre de grande taille nécessite une composition à plusieurs carreaux. Chaque pièce que j'ai réalisée peut être le modèle d'une grande fresque. Je peux le décomposer en plusieurs carreaux carrés ou rectangulaires et obtenir la taille que je veux : une vue panoramique ou vue rapprochée réalisée avec des carreaux 7x7, 9x9, 12x12, 20x20, 25x25, 25x16 …

Tous les rêves commencent par une passion et ma passion est la céramique et mon rêve : la faire fusionner avec ma réflexion d’architecte. En tant qu’architecte en Colombie, j’ai toujours commencé un projet en connaissant les besoins et les désirs de mon client, pour le traduire plus tard dans les plans et livrer une réalité qui durerait et qui répondrait et dépasserait leurs attentes. C’est cette relation que je recherche avec mes Fresques Murales sur demande. Trouver l’image des falaises qui vous inspire, trouver l’endroit ou la niche idéale pour l’exposer, que ce soit en intérieur ou en extérieur et réaliser le projet comme une pièce unique.

Les sujets d’inspiration de mes différentes Séries sont les falaises, les formes sculpturales, mes racines colombiennes.

C’est en tant qu’architecte et céramiste que je réalise chaque pièce et chacune d’elles reflète une partie de moi-même : mon histoire, mon vécu, mon parcours, mon savoir-faire, le sens que je donne au travail, mon âme, en somme.

Parmi les différentes Séries, je souhaiterais mettre l’accent sur quatre d’entre elles. La Série « Mapas » est le reflet de mon goût pour les plans de ville et notamment pour les cartes anciennes. Dans ces pièces j’ai traduit leur palette de couleurs et elles peuvent être exposées comme peintures murales en décoration intérieure ou extérieure sur les murs ou les sols.

La Série « Architecture » a débuté avec la collection de Vases inspirée par l’architecture du Musée Guggenheim de Bilbao, œuvre de l’architecte canadien Frank Gehry. Ils sont parfaits pour être présentés en groupe et découvrir alors les ombres et reflets qu’ils génèrent entre eux, constituant ainsi un ensemble sculptural. Vient ensuite la fusion entre l’architecture et les falaises qui donna naissance aux Vases Falaises, exposés et vendus à la galerie luzienne BLEU.

Vases aux faces lisses et autres faces texturées et toujours émaillés à l’intérieur.

La Série « Arhuaca » est une de celles dédiées à mes racines colombiennes. Inspirées par les sacs à dos en laine fabriqués par les indigènes Arhuacos, descendants de la culture Tayrona (Colombie), elles révèlent une grande force géométrique. 

La Série « Amazonas » inspirée par la vannerie indigène des Cubeos (Amazonie colombienne) met l’accent sur le graphisme et la répétition d’éléments géométriques.

Depuis que j’ai commencé la Série « Flysch » je suis particulièrement attirée par les formations géologiques du monde entier et cette année 2022, j’ai commencé la Série « Cliffs » dédiée à toutes les formations qui m’inspirent pour leur texture et les paysages marins spectaculaires qui les environnent.

Dans mon travail, j’éprouve une curiosité toute particulière pour le grès au naturel, pour la texture et la magie des émaux cuits à haute température et surtout pour la surprise qu’offre le résultat de cette cuisson à 1250 ºC.

Certaines personnes qui ont acheté mes falaises en céramique m’ont dit l’avoir choisie car elle leur rappelle leur chez-soi : en l’ocurrence le Pays Basque, quand ils sont loin.

Les falaises basques occupent plus de 14 km de côtes entre Socoa et Hendaye en France et 14 km dans le géoparc de la Côte Basque espagnole, entre Deba et Zumaia. C’est un symbole d’identité.

Cela se produit sûrement dans d’autres endroits comme l’Irlande, l’Écosse, l’Islande, la Californie et sur d’autres côtes françaises comme l’Étretat ou les Calanques sur la côte méditerranéenne.

L'intérêt de travailler sur des pièces représentant d'autres lieux m'a conduit sur la côte californienne et notamment à un endroit appelé Point Arena où j'ai trouvé une falaise aux mêmes caractéristiques que le flysch. J'ai réalisé un triptyque, qui est aujourd'hui exposé à la galerie BLEU, et qui a été précédé d'autres pièces de la côte californienne appelées et reconnues comme Big Sur. 

Étant connecté sur les réseaux sociaux comme Instagram, j'ai eu plusieurs conversations avec des gens que je ne connais pas mais quand ils regardent mes pièces, et ceux-ci en particulier ont réveillé des émotions à propos de cet endroit qu'ils ont comme leur propre identité.

Une série est dédiée à la Chaussée des Géants en Irlande du Nord, un lieu aux plus de 30.000 piliers, d'origine volcanique, d'environ 12m de haut. Je représente cette formation géologique avec du grès chamoté noir. Intéressant dans les tableaux avec la composition en plan de la grille hexagonale sous compression et dans les boîtes avec la vue en élévation des colonnes de basalte et pouvoir les empiler ou les regrouper en simulant le motif naturel, en simulant leurs ruptures naturelles, et parsemé d'algues et de mousses de différentes couleurs que je me fais éclabousser d'émaux sur la surface du grès.

Les peintures ont une particularité dans le résultat du ciel, quelque chose de dramatique. Toujours des intentions et puis de bonnes surprises. Il faut parfois baigner le grès noir avec du grès blanc pour qu'il ne consomme pas les émaux et ainsi qu'ils ne disparaissent pas.

Je suis toujours en quête de nouveaux défis et des découvertes qu’offre l’utilisation de différents types de grès, la couleur et la texture que donne la chamotte et les résultats d’un même émail appliqué sur des grès différents.

Ma recherche constante me mène aussi vers des changements de format, vers de nouvelles peintures, vers la réalisation de triptyques, de mosaïques ou de peintures qui deviennent aussi bien des sculptures de table que des réalisations aux dimensions plus grandes telles que des fresques murales.

Appliquer les émaux est, pour moi, l’occasion d’imaginer, dans un premier temps, les résultats, mais c’est aussi source d’infinies surprises. En effet, le bleu de la mer est rose lors de son application. Les émaux ne réagissent pas comme la peinture sur toile. Ils sont appliqués sur une texture terreuse et le grès déjà cuit a tendance à absorber l’eau de l’émail, d’où la difficulté de son application. Lors de l’émaillage, mon esprit imagine donc des ciels bleus ou nuageux, des mers calmes ou agitées, des falaises éclairées par le coucher de soleil ou dans l’obscurité. Je découvre des heures après, à la sortie du four, le résultat et ce moment est toujours plein de surprises et de magie.

Vivre dans une ville côtière comme Saint-Jean-de-Luz éveille et éveillera toujours en moi, des questions et une quête constante afin d’interpréter au plus profond le monde de la mer dans mes œuvres en céramique ».

Pour retrouver Liliana Rubio, à BLEU, la galerie et à son atelier-domicile, 23bis avenue Ithurralde (face au Jaï Alaï) à Saint-Jean-de-Luz

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