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Tradition
Le serpent d'airain, une énigme et un symbole ?
Le serpent d'airain, une énigme et un symbole ?

| François-Xavier Esponde 978 mots

Le serpent d'airain, une énigme et un symbole ?

Tous ceux qui découvrent à l’occasion du 15 septembre la fête de la Croix Glorieuse, le serpent d’airain inspiré du Livre des Nombres 2, 4b-9 s’interrogent sur le sens de ce symbole biblique d’un passé bien ancien.

Quel lien existerait entre ce mât dressé par Moise au désert et la croix du Christ ?
Figurant le serpent, la bête immonde de la Genèse des faiblesses humaines, la menace de mort sur toute vie, et la croix qui sauve par le christ vainqueur de l’ignominie ?
Un dialogue engagé entre Jésus et Nicodème de nuit rapporte le propos du maitre, “De même que le serpent de bronze fut élevé par Moise dans le désert, ainsi faut-il que le fils de l’homme soit élevé, afin qu’en lui tout homme qui croit ait la vie éternelle", Jean 3,14.

Nous sommes de toute évidence en Orient, au désert, au milieu d’un peuple menacé, et d’un rapport au surnaturel inédit.
Dans le désert les personnes attaquées par les serpents venimeux, levaient les yeux vers le mât dressé par Moise, et imploraient l’Eternel, pour leur guérison physique.
Un rapport au Christ en croix pour appeler de tous nos voeux la guérison de nos corps et de nos coeurs pour tout homme qui croit.

Paul de Tarse affirmera plus tard : Dieu notre sauveur veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la pleine connaissance de la vérité. 1 Tm, 2,3-4.

Pour les chrétiens, la fête de la Croix Glorieuse est liée à l’histoire des lieux saints de Terre Sainte, et aux premiers sanctuaires construits in situ dès le début du IVème siècle.
Dès la fin du Concile de Nicée 325, une date importante pour l’église, l’évêque Macaire de Jérusalem demanda à l’Empereur Constantin l’autorisation de faire des fouilles sur les lieux de la crucifixion et de la sépulture de Jésus, dont les anciens conservaient le souvenir.
L’empereur Hadrien dès le début du IIème siècle ayant voulu effacer toute trace originelle de ce lieu chrétien ‘’par effraction”, y bâtit une esplanade surmontée d’un temple de Vénus. L’intention était sans équivoque !
Mais la ténacité de Macaire permit de découvrir un immense rocher, nommé comme celui du Golgotha et la Grotte du Saint Sépulcre se révéla aux chercheurs.

Constantin, sur le conseil de Macaire, y fit construire une rotonde abritant le tombeau du Christ et un sanctuaire, le tout relié par de vastes portiques.
La mère de Constantin, Hélène fit le voyage à Jérusalem. Elle avait elle aussi fait pratiquer des fouilles sur le mont des Olivier et à Bethléem où un autre sanctuaire, celui d’Adonis avait recouvert la grotte de la Nativité.
En 335, on put procéder à la Dédicace de la Basilique de la Résurrection, l’évêque Eusèbe de Césarée considéré comme le premier historien de l’église qui relata ces événements originels qui font l’histoire, prononça un grand discours dont les premiers chrétiens firent bon usage, mais on ne parle pas encore du bois de la Croix.

En Orient où l’insolite, l’inattendu ne manque jamais, la découverte de la croix se produisit dans une citerne située à peu de distance. Le poteau portait encore “le titulus”, à savoir l’écriteau placé par Pilate - Jésus de Nazareth, roi des juifs -.

L’histoire put commencer.
L’évêque Cyrille de Jérusalem parle dès 347 dans ses catéchèses du baptême, des fragments de la croix, ces reliques inestimables, uniques et exceptionnelles.
Des fragments importants sont envoyés à Constantinople, Rome où l’Empereur Constantin fit construire la Basilique Sainte Croix à Jérusalem en souvenir d’Hélène sa mère décédée peu après son pèlerinage en Terre sainte.
A Jérusalem la célébration de la Croix donnait lieu à des liturgies mémorables et mémorielles d’exception.

Une religieuse des Gaules - Ethérie Egerie - fait le voyage à Jérusalem, elle est sans doute la première venue de par ici, vers la fin du IVème siècle.
Elle décrit les liturgies auxquelles elle participa.
C’est d’elle que nous savons que la solennité de la croix du seigneur est célébrée avec la dédicace de la basilique de la Résurrection le 14 septembre.

La fête fut reprise tout d’abord à Constantinople puis Rome par le pape Serge 1er, 687-701. On nommera cette fête, la fête de la Croix glorieuse.
Egerie fit connaître à l’église des Gaules le caractère unique des célébrations sur les lieux de Jérusalem. Elles furent adoptées par les liturgies orientales et latines au cours de la semaine sainte, où s’accomplit l’apothéose de cette manifestation , par les Rameaux, la Vénération de la croix du Vendredi saint, la référence de la foi chrétienne, les hymnes latines du temps de la Passion, et le souvenir des reliques de la croix du christ, quelque peu délaissées par la liturgie contemporaine, peu ou prou sensible à cette dévotion originelle.

En 559, l’empereur byzantin Justin II envoya à Sainte Radegonde un fragment du bois de la Croix conservé à Constantinople. On sait que la relique et le reliquaire existent toujours au Monastère Sainte Croix près de Poitiers.
Lors de la réception de ce reliquaire, Venance Fortunat, prêtre du monastère, composa plusieurs hymnes, dont "Vexilla Regis", que nous empruntons lors des vêpres du temps de la Passion et le "Pange lingua certaminis" propre à la liturgie du Vendredi saint.

Par la Croix glorieuse, le transport par Jérusalem, Constantinople, Rome, s’impose à tout chrétien d’aujourd’hui fixé par cette histoire spirituelle séculaire exceptionnelle.

Une histoire des croisades à laquelle le prix des reliques, leur découverte et leur protection ont donné un sentiment émotionnel particulièrement vif en France, en Gaule dirons-nous, où Terra Santa était synonyme de défense et de protection de tout ce que rapportait la vie du Christ et son sacrifice salvifique pour nous !
Il devait y avoir en cela bien plus que de la superstition, de l’idolâtrie, ou de fétichisme, parfois de l’intérêt, et de toute évidence un rapport au sacré qui dépassait le profit immédiat de sa rareté exceptionnelle !

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