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Poésie de la semaine
« Le Sens ! » par Eric Gildard
« Le Sens ! » par Eric Gildard

| Eric Gildard 625 mots

« Le Sens ! » par Eric Gildard

En attendant de reprendre le cours normal de ses riches activités au service du patrimoine de la belle villégiature côtière du Sud des Landes - sur le thème, cette année, de "l'art de vivre" -, le président des Amis du Lac d'Hossegor veut donner "du sens à nos orientations"...

Combien sommes-nous à vouloir donner un Sens à nos actions quotidiennes alors que nous sommes soumis aux « dictats » des faits ? Il me souvient avoir dit et écrit: « Voyons le SENS, comme orientation. Dans quelle direction j'engage l'Association des Amis du lac, en lui donnant un Sens comme raison, fondement, justification, destination, intention, et même valeur, car la recherche du sens renvoie à l'art de l'interprétation... Les philosophes entendent par sens « la destination des êtres humains et de leur histoire, la raison d'être de notre existence et de nos actions... »

C'est donc bien de cela dont il s'agit : D'une réflexion et d'un constat... Et j’entends comme un rappel le cri d’un piano qui, un soir sans lune, résonne encore au bord du lac... J’ai une chance inouïe, j’ai deux amis qui déchirent les nuages avec des mélodies. L’un peint. L’autre chante. Mais ivres de vie et de solitude, ils jouent du piano sur le sable mouillé qui fait grincer les notes...

Fatiguées, éraillées, leurs voix se mélangent aux éblouissements du soleil rougissant la dune et aux murmures du clapotis du fond du lac étranglé d’odeurs d’huîtres iodées... Ils chantent la beauté du désespoir. Leurs mains tremblent, leurs yeux luisants de larmes cherchent un écho improbable. Pieds nus, ils défient le monde, celui de l’ignorance insensible et de l’argent noirci pour avoir été trop blanchi.... Vélo, auto, bateau, piano... bars et poissons, rires et frissons, démesure, à mesure que le temps fuit. 
J’ai deux amis. Ils jouent du piano... dans tous les sens. Ils ont froid, l’âge aidant. Ils sont fiévreux d’amours déçus. Ils hésitent mais ils chantent... Ils plient, ils rient, ils prient, comme un appel à des sentiments d’humanité bafouée... Autour, c’est le tourbillon des Sens : les hommes sont-ils donc seuls et libres ? Obéissent-ils à des lois éternelles, découvertes par la raison... Raison ? Ordre et valeur ? Tout a donc un Sens...

Les pins s’inclinent avec des pleurs de résine au-dessus des belles villas fermées... Et mes amis, debout mais vacillants, cherchent l’amitié comme un ultime séjour pour la paix de leurs âmes, tandis que leurs regards butent comme désespérés sur d’autres regards sans joie... sans fierté, sans échos. Les mains se baladent encore de touches en touches, ridées d’actes inutiles... pendant que les Amis discrètement se réunissent au fond du lac... debout, sur une barque retournée, dans un impressionnant silence, le doyen des Amis lit le Serment du lac... pour Michel et Gérard et tous les autres... pour donner du sens - raison d’être - à l’Association des « gens » d’ici... J’ai deux amis...

Eric Gildard

Et pour apporter une note poétique supplémentaire à ce beau texte du président de l’Association littéraire des Amis du Lac d’Hossegor, nous joignons « Les Jonquilles », poème extrait du recueil de William Wordsworth :

J'allais solitaire, ainsi qu'un nuage
Qui plane au dessus des vaux et des monts.
Quand soudain, je vis, en foule,
Des jonquilles d'or, une légion,
A côté du lac, sous les branches grises,
Flottant et dansant, gaiement à la brise. 

Serrées comme sont au ciel les étoiles
Qu'on voit scintiller sur la voie lactée,
Elles s'étendaient, sans un intervalle,
Le long du rivage, au creux d'une baie.
J'en vis d'un coup d'œil des milliers, je pense,
Agitant la tête, en leur folle danse. 

Les vagues dansaient pleines d'étincelles
Mais elles dansaient plus allègrement.
Pouvais-je rester, poète, auprès d'elles,
Sans être gagé par leur enjouement ?
L'œil fixe, ébloui, je ne songeais guère
Au riche présent qui m'était offert.

Car si je repose, absent ou songeur,
Souvent leur vision, Ô béatitude !
Vient illuminer l' œil intérieur
Qui fait le bonheur de la solitude.
Et mon coeur alors, débordant, pétille
De plaisir, et danse avec les jonquilles.

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