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Tradition
Le printemps des mariages
Le printemps des mariages

| François-Xavier Esponde 1418 mots

Le printemps des mariages

Le mariage dans la Rome antique Emilio Vasarri. Boda romana..jpg
Le mariage dans la Rome antique par Emilio Vasarri ©
Le mariage dans la Rome antique Emilio Vasarri. Boda romana..jpg

1 – Le Droit romain a imprimé sa marque au rituel civil du mariage

Les Romains appelaient le rituel du mariage celui des Justes Noces, ius civile pour avoir des enfants reconnus en héritiers d'une filiation légitime. Le nombre d'enfants sans légitimité étant innombrable ! Engendrer des citoyens de la République et de l’Empire demeurait la préoccupation première des empereurs !

La cérémonie rituelle était diverse et possible de trois modalités dans la vie de cette société  dont le statut de la femme dépendait de facto comme mère.
Le mariage était reconnu soit Cum Manu, sous l’autorité du mari, soit Sine Manu, sous l’autorité du père de famille, avant une quelconque forme d’indépendance pour la femme soumise les premières années à l’autorité ou du mari ou de celle du pater familias jusqu’à la mort de ce dernier !

On distinguait dès lors trois types de rituels civils de la vie commune, confarreatio pour les patriciens, soumis à l’offrande rituelle au dieu Jupiter, pour ces classes sociales dirigeantes les plus en vue, coemptio soumis à un simulacre d’achat de l’épouse, pour passer sous l’autorité maritale, de ce mode  de vente symbolique, pour une piécette de bronze, l’usus enfin pour la majorité de la société plébéienne où suivante, une année de vie commune partagée entre les époux, on considérait le mariage accordé, sauf infraction toujours possible dans un délai de trois jours hors du domicile conjugal, sanctionné pour la femme d’exclusion ou d’abandon marital et par ce fait, le mariage déclaré nul .

Le Droit des Douze Tables régissait ces pratiques et les statuait de facto dans la Rome antique.

L’âge des mariages était précoce, douze ans pour une jeune fille, quatorze pour un jeune garçon, la plupart des mariages se célébrant autour des vingt ans, le devoir civique en cours pour tous disposait de ces unions au bénéfice premier de la citoyenneté d’où les célibataires semblaient exclus ou lésés par le nombre de contraintes et de taxes auxquelles ils pouvaient être soumis par défaut.
Les soldats eux mêmes, célibataires par vocation ou mission obligée, attendirent les mesures prises par Septime Sévère pour obtenir le droit de mariage les concernant.

Sortir de ce cadre civique par l’adultère, le divorce en cours, le veuvage ou la séparation était une offense aux divinités du foyer, et pour une femme esseulée une obligation de retour au domicile parental du Pater familias, sinon considéré comme une offense des Dieux Lares du foyer familial, entretenu par chaque famille comme un sanctuaire civil contraignant et récurrent.
On pouvait trouver des femmes émancipées, seules, assumant leur vie individuelle par leurs propres moyens, mais pour le cas exceptionnelles, dans des conditions sociales peu disposées à les reconnaître ou en favoriser le statut.

Si les riches demeuraient monogames par arrangement et confort personnel dictés par les raisons sociales et économiques les assurant, le peuple romain en son ensemble et en majorité se prêtait aux rituels civils communément partagés de fait, dont celui du gâteau  d’épeautre offert à la divinité, présenté au Grand Pontife de Jupiter pour valoir le mariage en cours, "par le truchement du flamen dialis" quasiment propre à toutes les classes sociales et aux observances suivies par tout un chacun pour se conformer aux lois du mariage en l’état.

Lors des fiançailles, l’époux mettait au doigt de sa fiancée l’anneau qui de ce fait lui ôtait tout autre prétendant possible et lui accordait le statut d’épouse par ces droits et des interdits pour la suite de la vie future.

On ne se mariait en mai du calendrier romain en cours, mais de préférence en juin, mois de Junon, car mai pour les romains était de mauvais augure, ce qui avec l’avènement du christianisme fut inversé, faisant de ce mois, le mois marial préféré des fiançailles et des mariages !
Le temps des ides et des calendes étant encore proscrit à nouveau, on retardait le temps des mariages au delà du premier trimestre de l’année pour satisfaire aux divinités et n’engager leur courroux par défaut ou par irrévérence.

Le rituel des fiançailles dont on a emprunté bien des signes encore de nos jours composait une liturgie vestimentaire enrichie de couleurs, de bijoux, de fleurs, de chaussures et de garnitures. La couleur orangée, la couronne tressée portée par la fiançée, le choix vestimentaire appuyé sur cette couleur, n’était pas fortuite mais apprise et ajoutée à quelque rituel en vue du mariage.

Le souvenir des vestales étant omniprésent par ces atours, les parents des fiancés se prêtaient au sacrifice domestique des Dieux lares, et à la consultation des auspices concernant l’avenir promis à ces jeunes époux.
La matrone choisie comme la prêtresse habilitée pour ce rituel familial unissait les quatre mains des jeunes gens, pour signifier à toute l'assemblée réunie pour ce moment exceptionnel, la solidité de cette union promise pour eux.

Le défilé animé “à la romaine”, pouvait s’ébranler jusqu’à la maison du marié, d’un cortège fleuri débonnaire ou enflammé, arrosé et parfois grivois ; un défilé rieur ou la quenouille ou le fourreau magnifiaient les vertus domestiques de la future épouse conviée dès cet instant à identifier ses marques et ses avantages.
Accueilli par le futur époux par le salut “Ubitu gaius, Ego gaia", où tu seras Gaius, je serai Gaia, on pouvait franchir le pas de la maison, soulevée à l’entrée pour ne déplaire aux mauvais sortilèges, en souvenir des Sabines, le mari apportant l’eau et le feu, symboles du foyer familial, les clés de la maison, qui désormais assureraient le gîte, couvert et conditions communes de la vie familiale..

Offrandes de présents, or ou argent, dévotion aux divinités lares de la maisonnée, les Romains se conformaient à ces règles qui faut-il le rappeler, se prolongèrent des siècles durant dans le temps de la République et de l’Empire, avant puis après l’avènement du christianisme  qui les adopta sans les rejeter mais les amender parfois dans les usages.

Dans un monde social où le divorce, la rupture conjugale ou la séparation étaient coutumiers, le mariage selon le Droit romain connaitra cependant des variations multiples du temps dont certaines rappellent des pratiques plus contemporaines, telles le recours aux tribunaux pour solutionner des difficultés, là où les romains invoquaient les divinités telles celles du temple Viriplaca où “la déesse de la réconciliation” toujours possible des couples séparés, pouvait intervenir in fine pour tenter le retour de la paix !

La société civile romaine connaissait la valeur du mariage pour la solidité de son Etat, par la famille, les lois pratiquées pour tenter sans cesse de la restaurer quand des lois plus libérales cherchaient à en défaire les contraintes.

La famille, le mariage et le nombre élevé d'enfants demeuraient des socles de solidité institutionnelle d'un empire laminé par le divorce, la mort des soldats au front des guerres impériales toujours en cours.

On cherchait sans cesse à les réviser si nécessaire pour garantir les avantages accordés aux couples, pallier aux difficultés financières de l’Etat en permanente demande de subsides militaires et ajouter aux familles des garanties sociales de l’impôt le plus proportionné pour en assurer la meilleure sécurité !

2 – Le mariage en 2023

Parfois contraints par le Covid qui s’est souvenu des projets retardés par la pandémie, les couples qui le souhaitent se préparent à célébrer leur union à partir du printemps, le long des mois de mai, juin, juillet avec, dit-on, une augmentation au cours de ces mois et en septembre.

Le profil juridique de tout contrat marital s’est complexifié le long de ces dernières décennies, le vocabulaire emprunté pour qualifier ces unions devenu nuancé, emprunte des formulations académiques pour ne froisser les parties prenantes, laissant à chacun le choix du mariage civil ou religieux tout d’abord et des conditions juridiques plurielles en vue de cet engagement.

L’échelle des valeurs, union libre, pacs, mariage mixte ou de même sexe développent un logiciel de variabilités contenues dans le Droit civil et validés par l’Etat-Civil en chaque commune de résidence des couples.

La présence de l’enfant souvent présent lors du mariage des parents, vient à conjuguer la vie du couple et leurs devoirs civiques vis à vis de leur progéniture.

Le régime matrimonial des couples arborant des nuances notables du côté de la sécurité sociale, de la caisse d’allocations familiales, des banques, des notaires, le sujet est devenu compliqué en raison du régime spécifique existant entre les unions maritales actuelles où la loi appliquée par le législateur codifie ces pratiques cherchant à les reconnaître et parfois les corriger !

Vaste sujet pour les juristes conviés à  la tâche de leur interprétation !

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FORESTIER | 25/03/2023 09:53

Merci Monsieur Esponde pour cette article fort intéressant Permettez-moi de commenter votre phrase « Le mariage était reconnu … sous l’autorité du père de famille, avant une quelconque forme d’indépendance [!!!] pour la femme soumise les premières années à l’autorité ou du mari ou de celle du pater familias jusqu’à la mort de ce dernier ! » Les historiens de la charnière du XIX-XXe siècle présentant la matrone comme un modèle de vertu, « forme d’indépendance » peut surprendre. De manière totalement en dehors de nos schéma de penser moderne, à Rome, cette indépendance pouvait s’acquérir de façon tout à fait légale en allant chez un « juge des affaires civiles » se faire inscrire comme courtisane ! Ce qui la contraignait de porter une « toge fleurie ». Quand les dignes juristes romains avaient autorisé l’inscription des Romaines comme Courtisanes, ce qui les obligeait à porter la « toge fleurie », ils avaient présumé que la honte les ferait renoncer. Ce fut exactement le contraire qui se produisit ! Pour des compléments, vous pouvez consulter mon article « Quand les femmes affirment leur liberté par leur façon de s’habiller - Rome » http://www.beaubiophilo.com/2018/02/quand-les-femmes-affirment-leur-liberte-par-leur-facon-de-s-habiller.html

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