Saint François-Xavier et l’histoire jésuite au Japon à travers cette visite papale, avec une pensée pour le père Loustalan, « in situ » actuellement.
De la Thailande au Japon, le pape François s’est voulu messager de la paix en ces pays du Soleil Levant au cours d’un voyage inédit en Asie.
- On le vit à Bangkok en pays Thai au milieu d’une minuscule communauté chrétienne d’à peine 0,6 % de la population totale, bouddhiste à 90 %, visitant hôpitaux et écoles ouvertes il y a plusieurs siècles par des Soeurs de congrégations françaises, rencontrant au cours de messes et de visites, des fidèles, des religieux, des chefs bouddhistes, et les jeunes à qui il adressa un message de confiance en l’avenir. Le souverain pontife porta un intérêt particulier aux femmes, mères célibataires, aux enfants abandonnés, à une population âgée de plus en plus nombreuse pour qui il demanda de la compassion et de la fraternité, par les Oeuvres missionnaires créées à leur service.
La Thailande, évangélisée tout d’abord par les Dominicains portugais, et royaume au temps des colonies, où les Jésuites puis les MEP - Missions Etrangères de Paris - enverront leurs jeunes recrues pour poursuivre leur mission. L’histoire se souvient de Théophane Vénard, un jeune français décapité et ses compagnons cités comme martyrs de la foi des chrétiens, il y a plus de trois siècles. En ce pays où affluent aujourd’hui plus de trois millions de migrants asiatiques - vietnamiens, philippins - dans la vie économique et sociale d’une nation multiculturelle, aux multiples religions, le message papal a retenu son auditoire.
François a rappelé la nécessité du dialogue et de la paix partagée pour les chrétiens en service fraternel en Orient, selon un statut particulier d’étrangers par leur origine, mais enracinés dans une culture locale, des parlers autochtones et des traditions spécifiques. Il encouragea cette inculturation pour l’avenir. Les images reçues de ces rencontres diffusent la multiplicité des rites, des costumes, des coutumes de ces sociétés orientales, d’un monde bien différent du nôtre, où rayonnent encore des chrétiens en phase et en empathie avec leurs populations.
- Au Japon, pays reconnu comme l’une des cinq puissances économiques du monde, le rendez-vous papal fut singulier à nouveau.
La visite à Nagasaki et Hiroshima, villes martyres de la guerre atomique du 9 août de 1945, portent encore les stigmates des crimes infligés aux populations décimées.
Les survivants de ces bombardements accueillirent le pape François. Malades dans leur corps, leucémiques irradiés pour la plupart, témoins conséquents des horreurs commises par la guerre à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Âgés et engagés pour dire aux générations suivantes, « plus jamais la guerre », portant la mémoire de leur jeunesse fauchée par l’usage des armes de guerre atomiques.
Les discours du pape François réitèrent les propos précédents tenus par Paul VI à l’ONU, puis le pape Jean Paul II lors d’un voyage au Japon, et contenus dans les citations du Concile Vatican II alertant « des risques de toute menace et usage de l’atome à des fins de dissuasion militaire, avec leurs menaces latentes de retour un jour encore à de telles pratiques reprises par les nations.L’arme atomique est un crime, la propriété de ces armes immorale, et sa disponibilité comme une dissuasion, perverse », l’occasion pour le pape de redire à Nagasaki et à Hiroshima son refus sans appel de l’usage de ces armes criminelles.
Le monde asiatique, les essais atomiques en Corée du Nord, les luttes d’influences entre la Chine et le Japon, montrent aujourd’hui des risques de voir un jour leur utilisation ultime sur des populations traumatisées comme pour Nagasaki et Hiroshima d’antan, témoins encore vivants d’un passé guerrier de l’histoire de l’humanité. A Nagasaki saluant la mémoire de Paul Miki et des jésuites assassinés comme martyrs de la foi, le pape a emprunté le terme du « martyre de la vie » pour toutes les victimes des bombardements atomiques au Japon portant sur le sacrifice d’innocents brûlés par le feu nucléaire et de millions de gens irradiés pour le reste de leur vie, sur des kilomètres alentour des points de leur diffusion. Pour les Japonais de toutes origines dans ce pays où l’histoire contemporaine fut dominée par la tragédie de la guerre mondiale, la visite du pape François relayée par les médias nationaux et internationaux l’a présenté comme un sage venu d’Occident, comme un messager de la paix universelle.
Jorge Bergoglio, alors jeune étudiant jésuite argentin, voulait déjà se rendre au Japon comme jésuite, mais les supérieurs en ayant décidé autrement, nul doute que cette visite lui permit de vivre intensément cette histoire personnelle parmi les jésuites présents, dont le provincial actuel, un Européen qui l’accompagna lors de cette visite japonaise.
Il visita l’Université Sophia de Tokyo fondée par les jésuites il y a plus d’un siècle, qui rappelle - depuis François Xavier jusqu’à nos jours - l’histoire de la congrégation dans ce pays où elle exerce son enseignement. Et, parmi les missionnaires basco-béarnais du temps passé chez les MEP de Paris, on cite plusieurs d’entre eux ayant séjourné dans ces villes bombardées après 1945. Cette visite papale permet de rappeler ce témoignage !