Les personnages bibliques ont inspiré au cours des siècles des récits romanesques habités des Ecritures Saintes, savoureux, orientaux dans l’âme, comme une broderie aux franges littéraires non vérifiées mais si agréables à toucher dans leur imaginaire.
1 - Ces textes ont été publiés et compilés à l’époque contemporaine.
Ils sont issus de différents genres littéraires, recueillant des récits, des visions, des propos de témoins, non retenus dans le canon officiel des Ecritures, mais de provenance plurielle : Géorgie, Egypte copte, monde latin, Ethiopie et Arabie.
Certains ont inspiré les légendes et les traditions, dont celle de l’âne et du bœuf, absents des Evangiles de Matthieu et de Luc - avec cependant une allusion à ces témoins silencieux du tableau primitif de la crèche dans l’Evangile du pseudo Matthieu, au VIème siècle.
Citons encore Le proto-Evangile de Jacques parlant de la naissance de Jésus et de Marie, sa mère, de l’histoire de l’enfance de Jésus ou Evangile selon Thomas, non officiel ou l’Evangile de l’enfance de Jésus écrit en arabe.
Savoureux mais si romanesques !
D’un abord narratif, si proche de l’image de la société contemporaine qui préfère les amitiés de Jésus aux disciples, les frères de Jésus d’une famille nombreuse imaginaire, ou les rapports de Marie avec d’autres compagnons, dans un genre iconoclaste dit moderne et qui reflète le monde tel qu’il existe pour beaucoup aujourd’hui !
2 - Visitons cette littérature livresque, la curiosité commande ce détour.
L’enfant de cinq ans, modèle des oiseaux en boue comme dans le livre de la Genèse, dans l’Evangile de l’enfance de saint Thomas. Les autres enfants sont émerveillés. Ils comprennent que cet enfant est exceptionnel à leurs yeux. Dans un autre texte, Joseph corrige son fils Jésus. Un artiste a même peint en 1926 la fessée d’un enfant charnu par Marie, sa mère, sous le regard de trois témoins, Paul Eluard, Max Breton, Max Ernst, au Museum Ludwig de Cologne, totalement livresque et bien inspiré de cette tradition romanesque toujours attrayante pour les artistes, les peintres et les cinéastes.
Dans la littérature de l’enfant Jésus en arabe, Jésus aide son père charpentier, en imposant les mains sur les planches, pour les ajuster à son travail.
Dans ce même texte est racontée l’aventure de Joseph, Marie et leur Fils prodige en Egypte au zénith des miracles, des révélations, des confidences que le lecteur dévore avec gravité.
L’enfant Jésus a livré ses langes et son eau de bain aux dévotes de son enfance donnant lieu à des pratiques déconseillées aux fidèles mais ayant existé ; toujours pratiquées en Orient selon la tradition et les rites séculaires, elles ont été largement relayés au Moyen Age, jusqu’aux chapelles de dévotion de notre vieille Europe ...
En consignant ainsi la vie de Jésus dans la mythologie et le merveilleux, on trouve cependant de la beauté narrative dans le texte fasciné par l’ineffable, l’indicible, de la théophanie biblique de ce fils prodige qui consterne, séduit ou attise la curiosité du témoin des Evangiles.
Le superlatif n’ajoute rien de plus au conte originel, mais le conte inspire les débordements de l’imagination de chaque époque de la vie des hommes. L’âne et le bœuf de la crèche, les sages-femmes pressées de visiter Marie, la mère de Jésus en couche, les mages, la fuite en Egypte, sont les thèmes favoris des peintres et de leur public dans de nombreuses cathédrales et églises de France. Pour ne citer que celles de Paris, Chartres, Senlis, Laon, Auxerre, Sens et Reims… Et le couronnement de Marie par Jésus, de la mère par le fils, est un sujet précurseur choyé par les sculpteurs.
Les croyants du Moyen Age ont vénéré les reliques des saints Prépuce et saint Ombilic, Cluny a conservé les saintes dents de Jésus, l’une d’elles se trouvant dans la chapelle du château de Versailles.
Qu’importe les doctes gens qui s’en offusquent sans voir les dessous féminins de quelques actrices du moment ou les maillots de sportifs s’arracher aux enchères à prix d’or, une pratique inspirant de l’amusement plutôt que la confusion des esprits !
La légende dorée du dominicain Jacques de Voragine relative à l’enfance de Jésus permet à des générations de jeunes de découvrir sous la chape de la doctrine le visage humain de l’Enfant-Dieu avec le langage familier de chaque époque. Il est sans doute probable qu’aujourd’hui, l’universalité du message chrétien arbore selon les cultures, les langues, et les parlers des moyens inconnus à des usages particuliers pour diffuser dans le texte et par l’image la vie de l’Enfant-Dieu depuis sa naissance !
Nul doute que le nôtre évoluera dans le réseau des internautes avec des outils de communication décuplés et requerra une compréhension du texte originel indispensable avant toute digression périphérique du commentaire en images, supérieur aux moyens dont on disposait jusque-là pour raconter la Bonne Nouvelle évangélique sur papier imprimé, au stylo bille et en photocopies légendaires du passé qui désormais semblent dater quelque peu !
François-Xavier Esponde