« La merveille de l’automne basque ! » Lorsque le soleil éclaire les tons roux veloutés des fougeraies de la montagne, les forêts de hêtres, les chênes et les châtaigniers revêtent leur flamboyante parure et l’air humide sent déjà la feuille morte mêlée à l’humus, paradis des cèpes et des « perratxikus » (champignons). Haize hegoa (le vent du sud) qui porte sur son aile la fièvre bleue des vols de palombes joue alors les prolongations de cette saison reine au-delà de novembre et même de décembre ; soufflant en folles bourrasques, « il donne toute sa valeur au paysage qu’il illumine et découpe en gros plans puissamment colorés, au dessin net, presque excessif », remarquait Gaëtan Bernoville.
C’est le moment idéal pour parcourir la montagne souletine ou bas-navarraise. C'est là que vous enveloppe cette lumière si particulière du Pays Basque : mieux qu’un peintre, Maurice Ravel sut exprimer cette alchimie qui fait le paysage euskarien. Il appréciait « un soleil à l'éclat fin » qui lui faisait dire : « le peuple s'en ressent, il est agile, élégant, et sa joie n'est pas vulgaire. Les danses sont légères, d'une volupté sans outrance »…
Dans une passionnante entrevue avec Philippe Sollers dans « La Cause littéraire », mon ami Philippe Chauché rappelle que « Roland Barthes descendant en voiture vers Urt sur les bords de l’Adour, où résidait sa mère, et où il repose aujourd’hui à ses côtés, parlait de la lumière du Sud-Ouest : Une lumière lumineuse, et à l’automne, liquide, rayonnante, déchirante puisque c’est la dernière belle lumière de l’année ».
Et me reviennent alors en mémoire les vers pleins de nostalgie de Jacques Prévert, lorsqu’à l’automne, cheminant sur la Grande Plage de Biarritz pour affleurer les vaguelettes en dentelles de la marée montante, l’océan efface nos pas sur le sable, comme « la vie sépare ceux qui s'aiment, tout doucement, sans faire de bruit »... et « les feuilles mortes se ramassent à la pelle, les souvenirs et les regrets aussi »...
Mais la pensée revient vite aux préoccupations journalières et l’actualité nous rappelle sans cesse le sempiternel sottisier quotidien :
attention aux feuilles mortes, prévenait alors avec beaucoup d'esprit Gustave Thibon, car « Être dans le vent, n’est-ce pas une ambition de feuille morte… » ?
Je crois que nombre de nos supposées “élites” et de nos gouvernants se plaisent en automne !