« The Dead Don’t Die » - Film américain de Jim Jarmusch – 103’
Centerville, petite bourgade paisible, quelque part aux États-Unis. Deux policiers, Cliff Robertson (Bill Murray) et Ronald Peterson (Adam Driver) patrouillent en voiture à la recherche de Bob (Tom Waits), un ermite vivant dans la forêt. Ce dernier aurait volé un poulet au fermier irascible Miller (Steve Buscemi). Les enquêteurs, bons enfants, ne trouvent rien : pas de Bob, pas de poulet. Sur le chemin du retour ils s’étonnent du manque de luminosité à cette heure du jour… La radio de la voiture ne fonctionne pas bien…Ils écoutent un standard de la musique country… Ils apprennent que la terre suite à des excavations titanesques a brusquement changé d’axe de rotation : l’ambiance générale semble très bizarre y compris dans leur commissariat où ils sont rejoints par leur jeune collègue, Minerva Morisson (Chloë Sevigny), apeurée.
D’autres habitants de cette bourgade vaquent paisiblement à leurs occupations à peine dérangés par cet étrange phénomène ; Zelda Winston (Tilda Swinton) une thanatopractrice maquille dans son laboratoire deux golfeurs décédés, frappés par la foudre, le « geek » Bobby Wiggins (Caleb Landry Jones) gérant d’une petite boutique, des habitués d’un « diner » comme Hank Thompson (Danny Glover), etc. Un trio de jeunes « hipsters » conduit par Zoé (Selena Gomez) arrive en « Pontiac Tempest » à la recherche d’un motel pour la nuit…
La catastrophe écologique a une terrible conséquence : les tombes s’ouvrent et des morts-vivants en sortent sanguinolents, titubants. Ils convergent, dans l’obscurité, vers Centerville…C’est l’assaut général : des zombies, par grappes, attaquent toute personne vivante sans distinction.
Un combat féroce s’engage entre les habitants de cette bourgade. Les zombies sont toujours plus nombreux, plus cannibales. Être mordu par eux c’est devenir à son tour rapidement un mort- vivant et rejoindre la cohorte des agresseurs.
Les vivants doivent résister à tout prix, les éliminer, gagner la guerre contre les monstres…
Pour son treizième long métrage, Jim Jarmusch (66 ans) également scénariste, a choisi de revisiter sous un mode humoristique, distancé, le genre très fécond des films d’horreurs dans la veine de la Nuits des morts-vivants (1968) de George A. Romero film culte de zombies. Son dernier opus est parsemé de références, de clins d’œil, à des œuvres cinématographiques aussi célèbres que Stars Wars (1977) de George Lucas, Psycho (1960) d’Alfred Hitchcock, etc. La mise en scène est comme toujours chez ce réalisateur, élégante, plaisante quelque peu nonchalante. Le metteur en scène ne prend pas l’histoire somme toute horrifique au sérieux et nous offre des volutes de fumées (pour les décapitations !) plutôt que des gerbes de sang inhérentes à ce genre de film. Il introduit une distance amusée, voire indolente dans le récit : les policiers, hormis leur collègue terrorisée, devisent entre eux d’une manière laconique, sans affects, la thanatopractrice « zen » manie le sabre de samouraï à la perfection telle une icône de jeux vidéo, etc.
Cependant, ce style narratif, distancé, souligne la faiblesse du scénario à mi-parcours du récit : les personnages trop stéréotypés (attitude, langage) n’y sont pas développés, ils ne « progressent » pas nonobstant l’environnement de plus en plus horrifique.
Jim Jarmusch et ses acteurs, amis dans la vie, se sont probablement bien amusés en tournant cette fable écologique mordante, mais faute de scénario mieux construit (non répétitif), ils ont oublié les spectateurs en chemin. C’est fort dommage car le réalisateur, poète reconnu du cinéma indépendant américain, nous avait habitué dans ces précédentes œuvres, « Broken Flowers » (2005), « Paterson » (2016) par exemple, à plus de rigueur dans son discours cinématographique. La farce écologique « Armageddon » fait long feu, mais demeure modérément jubilatoire.
The Dead Don’t Die est le film d’ouverture en compétition officielle du 72ème Festival de Cannes.