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Des Hommes
Figures originelles des Jeux Olympiques : Paschal Grousset et Pierre de Coubertin
Figures originelles des Jeux Olympiques : Paschal Grousset et Pierre de Coubertin

| Jean de l'Ecluse 887 mots

Figures originelles des Jeux Olympiques : Paschal Grousset et Pierre de Coubertin

Deux figures de premier plan à la promotion et au renouveau des JO à la française au cours du XIXème siècle mais deux hommes aux convictions idéologiques distinctes qui s'affronteront sur le terrain du stade et de la vie publique parisienne toute leur vie

L'aristocrate Pierre de Coubertin et le communard Paschal Grousset (notre photo de couverture) auront en commun la faveur du sport à l'école comme enjeu politique de l'éducation de la jeunesse pour servir le pays et la race blanche. Une désignation qui aujourd'hui fleure le soufre, mais à l'époque, au sortir de la guerre de 1870, sent le besoin de renouveau national.

Paschal Grousset 1844 -1909 est un peu plus âgé que Pierre de Coubertin et restera l'adversaire, et parfois l'ennemi de son vis à vis pour des vues irréconciliables

La Belle Epoque aime le confort et l'esthétique de chaque vie, le sport et les accompagnements y contribuent, et de surcroît, un culte viril et prisé de la masculinité entretient chez les messieurs ce besoin livresque de porter haut et bien le panache de la bienséance virile. Une désignation aujourd'hui qui se prénomme le machisme et la misogynie.

Paschal Grousset a de multiples cordes à sa vie intellectuelle. Journaliste scientifique, écrivain pour les enfants, auteur à succès de nombreux livres en compétition avec Jules Verne, pour lequel il va travailler tout en entretenant avec lui une concurrence littéraire singulière...

Il est aussi homme politique de la Commune de Paris aux bonheurs et affres connus par l'histoire. Il lutte ardemment contre le Second Empire, et par ce fait même, contre Pierre de Coubertin, peu disposé en ces années à rejoindre le camp républicain.

Nous somme en France où les bleus royalistes et les rouges républicains se toisent, se détestent, et parfois se désirent... 

Il siège au Conseil de la Commune de Paris en 1871, député radical socialiste en 1893 et jusqu'à sa mort en 1909, neuf ans après Pierre de Coubertin
Proche de Clémenceau, de Jaurès, de Vailland, de Millerand, il mène une vie politique et littéraire, à la fois admirant la société anglaise comme le firent encore Pierre de Coubertin et Didon à leur heure, pour la place accordée au sport au bénéfice de la jeunesse. Leur désir était d'introduire une telle posture dans l'esprit éducatif français !

L'écrivain poursuit son œuvre avec vingt romans destinés aux enfants des écoles communales parisiennes, car tel était bien son défi, apprendre et pratiquer par le sport une scolarité épanouissante des enfants qui un jour deviendront des citoyens virils et adultes du pays en demande irrépressible de patriotes matures et préparés

Il est le premier traducteur du livre "L'ile au trésor" de Stevenson en français et conduit en même temps le projet "Lendit", à savoir les JO à la française à une époque où le nationalisme des Etats européens pense pour soi ces Jeux Sportifs pour leur propre gouverne avant celle des autres.
Le but de ce Lendit étant de développer la compétition multisport à la française comme une empreinte nationaliste et patriote du sport au service de cette cause en souffrance en raison de la guerre et de l'esprit belliqueux d'une Europe en constance rébellion 

Coubertin élargira cet esprit à l'international selon une idéologie différente. Elève des Jésuites de Paris son éducation n'est pas absente de ses vues sportives

Les jeux de 1896 font la part belle au pacifisme avec Didon, ce qui pour Grousset demeure une ineptie ou une illusion.

La volonté de développer une élite sociale de premier choix - masculine s'entend - préoccupera Coubertin à l'international dans une intention de rejeter toute guerre prochaine ou potentielle et faire grandir la concorde entre les nations. On sait ce qui adviendra !

Grousset, revenu de toute adhésion à une guerre civile franco-française, déclamera le culte du sport comme "renaissance physique de la race", un surplus de santé et de vitalité, l'apprentissage des mêmes valeurs par une connaissance mutuelle, de la solidarité effective, mais pour le peuple en son ensemble, sans choix sélectif d'origine, de religion, de classe sociale et de sexe..

Les nuances ici prennent sens !

Grousset s'adresse à ses fidèles des Ecoles Communales de Paris, Coubertin choisit à son tour les siens, du côté des écoles confessionnelles.

On assistera à une démonstration de masse des enfants lors de rencontres géantes comme celle de 140 000 enfants réunis pour des compétions sportives dans tous les stades ou terrains sportifs de la capitale.

Deux mondes se toisent, se recherchent mais s'ignorent de facto.

Le sport pour la promotion de la jeunesse, la concorde des nations, et la noblesse patriotique de JO à la française, mais à quel prix ?

L'heure n'est pas encore au compromis des esprits en concurrence.

Dans son ouvrage Sport et éducation physique à la française écrit par Pierre Lebecq à Riveneuve (collection Pépites), "l'exaltation de l'athlétisme mâle, l'internationalisme pour base des JO, la loyauté pour moyen, l'art pour cadre et l'applaudissement féminin pour récompense" prédomine encore dans les esprits de ce temps passé, désormais centenaire, selon les propos tenus par Pierre de Coubertin lui-même.

Le sport et la politique ne se dégageront pas totalement des contraintes idéologiques de ce passé. 

A l'heure des prochaines JO à la française, ce détour par l'histoire devrait aider à comprendre la nature des enjeux d'hier et de demain contenus dans ces rencontres internationales prochaines !

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