Nous sommes au quatrième siècle de l’Eglise dans les temps héroïques des premiers témoins du christianisme qu’Ephrem illustre dans la profondeur spirituelle de l’Orient.
Ephrem est au cœur d’un temps difficile à Nisibe en Syrie, actuellement au Sud-Est de la Turquie, au cœur des rivalités romaines et perses, sur le passage des relations commerciales entre l’Orient et l’Occident.
Dans sa jeunesse, sa ville est occupée par les Perses et les rivalités sont nombreuses pour retrouver la ville et l’histoire de ses origines.
A 56 ans, Ephrem quitte Nisibe pour Edesse en Turquie où, comme bien souvent dans cette région, on pratique le syriaque et d’autres parlers locaux. Devenu diacre il participe aux débats religieux et politiques de son temps - d’hier comme ceux d’aujourd’hui - au milieu de tensions entre les juifs, des groupuscules chrétiens virulents et des cultes païens anciens, enracinés et vivaces. Formé par un évêque qui participa au Concile de Nicée, Jacques de Nisibe, il est initié jeune par son maitre aux discussions animées entre chrétiens et non chrétiens.
Les disciples d’Arius seront du nombre, excommuniés de l’église primitive, mais l’excommunication accentue la division et pour Ephrem, spirituel et esthète de l’Esprit Saint, la création artistique de ses hymnes et de ses chants donne vie apaisée à une tradition orientale de la prière, d’une rare beauté.
De la bible, peu connue pour les fidèles, à l’usage des chants familiers de la liturgie, Ephrem s’applique à mettre en voix et en musique ses majestueuses compositions que l’on désigne comme « les lyres de l’Esprit Saint ». Empruntant au philosophe syriaque Bardenase ses hymnes, la méthode appliquée d’Ephrem permet aux fidèles de chanter et de mélodier ses partitions musicales : nombre de fidèles pourront ainsi acquérir un patrimoine spirituel inspiré des Evangiles et de l’Esprit Saint.
Le souffle de l’Esprit venu de l’indicible, les voix du mystère divin empruntées de la tradition des anciens, les paroles du Christ qui parlent un culte invisible qui émeut. Ephrem transcende les cultes des païens des divinités environnantes, donnant un répertoire incroyable de poèmes à l’Esprit Saint, l’Esprit qui inspire et nourrit l’intelligence des choses divines.
Une conviction forte de l’Orient depuis les origines.
Grâce à ses plus de quatre cents cinquante hymnes mélodiés et accompagnés à la lyre, Ephrem devient la muse chrétienne qui s’adresse à l’âme intérieure du fidèle. Celui-ci perçoit dans la composition unique de ces chants, un rapport d’une rare beauté avec l’Eternel.
Hier et aujourd’hui, le langage de l’Art au bénéfice de la vie spirituelle soutient sans cesse ce désir « de communier avec l’Esprit qui parle à notre esprit », ce monde de l’intimité divine dont se nourrissent chaque jour les relations personnelles des moines qui lui ont consacré toute leur vie. Ephrem fut un génie de la création, son exemple fut souvent emprunté dans les monastères cloîtrés masculins et féminins pour accompagner la prière des moines de la lumière des sons et des voix contemplant la source de ces vocations primitives de l’Eglise. Partageons cet hymne parmi les centaines d’autres qui traversèrent les frontières de l’Orient et qui nourrissent encore aujourd’hui la prière des religieux en communion avec l’Eternel...
« Le Seigneur vint en Marie pour se faire serviteur,
Le Verbe vint en elle pour se taire dans son sein,
La foudre vint en elle pour ne faire aucun bruit,
Le pasteur vint en elle et voici l’Agneau né, qui pleure sans bruit.
Le Très Haut vint en elle mais il y entra humble,
La splendeur vint en elle, mais revêtue de vêtements humbles,
Celui qui dispense toutes choses connut la faim,
Celui qui étanche la soif de chacun connut la soif.
Nu et dépouillé, il naquit d’elle, lui qui revêt de beauté toutes choses »...