1 – Le centurion romain
Passer de la figure du centurion - militaire dans sa fonction - à la proximité de l’Evangile peut paraître un pas de géant qu’il est difficile d’ignorer au sein de l’Empire romain, de ses forces et de ses pouvoirs exercés par ces officiers dans les royaumes respectifs placés sous leur gouverne.
Le Centurion de l’armée romaine était un officier au milieu d’un dispositif de soixante centuries dans chaque Légion. Selon un calcul évalué de cent soldats - plus ou moins - selon les légions, allant du premier grade aux centuries de moindre hiérarchie comme d’usage dans tout commandement militaire.
Le symbole de dignité du centurion, de ses pouvoirs et de ses devoirs, était le Cep de vigne. Ces règles évolueront au fil du temps et de l’engagement de ces légions au cours de l’histoire de l’Empire. Les soldats étaient tirés au sort pour chacune des campagnes annuelles, les postulants attendaient fièrement la suivante pour s’engager et porter les armes. Un honneur, une gratification chère au cœur de tout romain en âge de servir l’Empereur.
Le centurion étant élu par ses pairs pour commander son unité, le manipule, le dit Prior disposait de gradés Postérior comme des sous-officiers de toute armée structurée et dirigée par ses chefs.
Le Pimipile, - premier des guerriers gradés - représentait une notabilité révérée dans la Légion romaine. Le premier à se lancer dans la bataille, homme respecté et suivi lors de l’assaut, un poste honorifique attribué à un soldat déjà expérimenté.
Les attributs de chaque soldat et particulièrement pour le centurion étaient le glaive, le scutum, le casque protégé par ce bouclier orné et décoré de fleurs et du cep de vigne.
2 – Nouveaux venus dans l’Eglise.
Quand les évangélistes Luc et les Actes mentionnent l’arrivée de centurions dans les rangs des communautés chrétiennes, il s’agit bien pour ces soldats d’un changement de monde et de conversion radicale proprement dite. Adeptes du dieu Mars, leurs canons et leurs codes militaires ne sont guère bibliques. Ils sont inspirés de ces myriades de dieux cosmiques qui commandent leurs conduites. Car l’Empire et sa Religion militaire, le sens de l’Empereur divinisé et de ses attributs voués au culte de l’adoration des soldats, les festivités patriotiques, et les batailles semblaient être interdits à ces hommes qui se détournaient de toutes ces idoles d’une vie passée pour approcher Adonai, un culte nouveau, inconnu et l’objet de rejet pendant des siècles.
Luc prendra soin de désigner trois centurions devenus chrétiens : celui à Capharnaüm, ou Corneille, qui partageait l’amitié de Pierre au grand scandale des juifs chrétiens de Jérusalem, rebelles à cette alliance de l’Empire et de la foi en Jésus le Christ.
Et la figure du centurion au pied du Golgotha sera touchante parce que le bon soldat donnera sa version affectée du drame qu’il eut à accomplir devant un innocent tué sur la croix du supplice des justes.
Autre soldat, le Pro-Consul de Chypre, Actes, 3 représente une évolution des esprits en faveur du christianisme jusque dans l’armée romaine, peu sujette à embrasser de fait cette religion si peu romaine et si inaudible pour ces hommes de terrain militaire.
La figure du centurion à qui on prêta ces paroles dans les évangiles - « Seigneur je ne suis pas digne de te recevoir mais dis seulement une parole et je serai guéri » - de la part de Matthieu 8,5-13 et de Luc, 7,1-10 en disent long sur le chemin parcouru au fil des décennies pour nouer un fil entre les soldats de l’Empire et les enfants de la promesse désignés par les évangélistes.
Le centurion est un homme comme tous les autres, sans nom, pourvu d’une fonction, mais non évalué dans l’église à ses grades militaires. Il est anonyme, venu rencontrer le Christ pour connaître son ministère de prophète et recevoir ses forces intérieures d’un dieu autre que Mars.
En Orient, le thaumaturge que fut Jésus Christ fit des conversions parmi le peuple et les centurions, soldats à la solde de l’Empire, ne furent pas écartés de ces bienfaits.
Soldats portant le glaive et le bouclier, devenus serviteurs détachés de la Bonne Nouvelle du Seigneur, l’histoire conte la place de ces hommes de devoir devenus croyants et toujours prêts pour un service qui embrasserait le monde à la manière de ces centurions dont le modèle évangélique deviendra contagieux !
François-Xavier Esponde